On ne peut pas dire que je ne varie pas mes lectures en ce moment. Après la mélancolie de Jérôme Leroy, le flic borderline très hardboiled de Stuart Neville, je fais la Révolution avec Sébastien Gendron.
Georges Berchanko et Pandora Guaperal ont un point commun : ils bossent tous les deux dans l’agence Vadim intérim, une boite bien pourrie qui les exploitent jusqu’au trognon. Et cela pourrait continuer. Jusqu’à ce que, sur une erreur toute bête, Georges se retrouve avec une voiture, une liasse de billets et un flingue (après, accessoirement, avoir flingué le client). Et que Pandora soit à deux doigts de se faire lyncher suite à un boulot dégueulasse de plus.
Quand ils se croisent dans un bar, ça fait tilt, et ils décident que ça suffit. Et que leur cas n’est pas unique. Qu’il est temps d’inciter les gens, qui acceptent tout sans jamais ruer dans les brancards. Que le temps de la révolution est venu.
« J’en ai rien à foutre d’être traitée d’extrémistes par des gens qui manipulent l’information pour effrayer tout le monde. Moi, ce que je veux, c’est que les gens se révoltent. Dans ce pays, c’est tout à fait légitime. Des révolutions ici, il y en a eu et elles ont changé le monde. Vous vous souvenez de cette ministre de l’Intérieur qui proposait au Parlement d’envoyer nos experts de la police nationale pour aider Ben Ali à mater la révolution tunisienne ? Une ministre de la V° République, héritière directe d’une démocratie qui s’est construite grâce à un soulèvement populaire plus de deux cent ans auparavant ! Notre classe dirigeante ressemble de plus en plus à celle qu’on a envoyé à la guillotine en 1789. Des gens qui n’ont plus aucun rapport avec le peuple et un peuple qui les traite de pourris et s’éloigne de plus en plus des urnes. Vous trouvez ça normal ? Pas moi. Je trouve ça à vomir. »
Voilà, c’est dit. C’est un peu en vrac, mais c’est dit. C’est dommage que Pandora, au lieu de causer à une journaliste opportuniste ne soit pas tombée sur Spider Jérusalem …
Je ne vous dirai pas que c’est le roman pour vous si vous aimez les romans à l’intrigue millimétrée, où l’on découvre à la toute dernière page que c’est le majordome qui a tué avec le tisonnier dans le salon. Ni si vous voulez découvrir une nouvelle époque ou un nouveau pays avec force détails tous plus exacts les uns que les autres.
Mais si vous en avez votre claque des débats à la con, si vous avez déjà la nausée à l’idée de ce qui nous attend cette année, si la coupe est pleine, si vous avez encore la force de râler, de gueuler de vous indigner. Et si vous voulez le faire sans pleurnicher mais avec une énergie jouissive et communicative, alors oui, ce roman est pour vous.
Ajoutez à cette rage, la description sans pitié mais extrêmement lucide du monde du travail, de l’humour (noir l’humour), une fantaisie débridée et des scènes de bravoure beaucoup plus maîtrisées qu’il n’y paraît et je n’ai plus qu’une chose à dire : Merci monsieur Gendron, ce roman fait un bien fou.
Sébastien Gendron / Révolution Albin Michel (2017).
On m’en a dit du bien !
On a eu raison !
Road Tripes du même auteur pourrait t’intéresser, alors… Un poil cinglé, mais ça détend pas mal.
Je note, et ça ne m’étonne pas du tout que ce soit un poil cinglé !
» Quelque chose pour le we » m’avait beaucoup amusée et suis entrain de lire » le tri sélectif des ordures…. « . Comme tu le dis si bien, c’est plein de fantaisie débridée !
Des îlots de rires, sourires. Des parenthèses qui font du bien.
» Révolution » arrivera tôt ou tard dans ma bibliothèque 🙂
Quelque chose pour le WE est rigolo, mais pas aussi clairement engagé politiquement ! Et je n’ai pas lu le tri sélectif dont j’avais pourtant entendu dire le plus grand bien.