Ca y est, le nouveau Dominique Manotti prévu en avril est sorti, et c’est un Daquin : Marseille 73.
Quelques temps après Or noir, Théo Daquin, le parisien, est toujours en poste à l’Evêché (le haut lieu de la police) à Marseille où il est bien difficile de se faire une place quand on vient du nord. Et qu’on n’est ni corse, ni pied-noir. Et homosexuel en prime.
Fin août début septembre, alors que le racisme anti algériens est exacerbé par les dernières prises de positions du gouvernement Pompidou, à Marseille où vit une forte population pied-noir, et où de nombreux anciens de l’OAS sont entrés dans la police la situation est véritablement explosive. Les meurtres d’algériens se succèdent, les enquêtes de donnent rien, la police, la justice et la presse sont complices.
En confiant à l’équipe de Daquin une vague opération de renseignement sur une officine d’extrême droite, en liaison avec les collègues de Toulon, son supérieur qui veut s’en débarrasser croit le neutraliser. C’est pourtant ça qui va faire exploser l’affaire.
Difficile de faire un plus grand écart stylistique que de passer d’Alex Taylor à Dominique Manotti. Ici pas un adjectif, pas un adverbe de trop. Les phrases claquent, sèches, scandées. C’est sec précis, implacable.
J’étais enchanté de retrouver Théo et ses collègues de Marseille. L’intrigue est toujours aussi impeccablement menée, rien n’est laissé au hasard, avec aucune concession pour un potentiel happy end. Du pur Manotti, parfait dans le style.
Et quel tableau de cette ville au début des années 70. Racisme ambiant, forces d’extrême droite qui ne sa cachent absolument pas, début de révolte des populations immigrées exploitées, maltraitées et assassinées, une police et une justice à vomir, une presse dégueulasse, un pouvoir d’une hypocrisie totale. On rage, on vit comme si on y était la frustration, la haine, la bêtise, mais aussi la solidarité ou la joie d’une grève qui marche.
C’est immonde, c’est révoltant, c’est salutaire de le rappeler … Et on s’aperçoit que les pourritures d’aujourd’hui ne font jamais que répéter les discours des pourris d’hier, et que les saloperies actuelles prennent racines dans celles du siècle passé.
Bref, comme toujours Dominique Manotti passionnante, indispensable, incontournable. Mais cela ne devrait être une surprise pour personne ici.
Dominique Manotti / Marseille 73, Les arènes/Equinox (2020).
Dominique Manotti est une de mes auteurs préférés. J’ai hâte de lire cette nouvelle enquête de D’Aquitaine, alors que je lis très peu de romans de procédure : Manotti, c’est d’abord du noir.
Daquin, bien sûr (la peste soit de ce correcteur d’orthographe).
La peste, je confirme.
Le procédural, quand c’est dans les mains d’un bon, c’est potentiellement très bon. John Harvey, Graham Hurley, ou le Maître monsieur McBain bien entendu. C’est vrai que les anglo-saxons sont très forts dans ce style, certains s’y sont essayé avec moins de talent. Mais on en trouve aussi de l’excellent, à leur sauce, ailleurs, les Martin Beck, Wallander, Erlendur, et plus latins mes copains italiens, Soneri, Montalbano, Ricciardi … c’est vrai qu’en France, c’est sans doute Dominique Manotti qui réussit le mieux dans ce style. Et tous ceux-là écrivent bien du noir.
Manotti, une de mes auteurs préférés. J’apprécie quasiment tout ce qu’elle fait. Je me réjouis de retrouver Daquin. Je me suis mis ce livre sous le coude pour les vacances. Vais je pouvoir attendre jusque là !!!
Je patiente en dévorant du Mc Bain.
Il y a pire comme occupation !
Depuis le temps que j’entends et lis du bien de Dominique Manotti j’avoue n’avoir jamais lu un seul de ses polars. Mea culpa. Par lequel je devrai commencer selon toi ?
PS : je viens de terminer le denier Connolly/Charlie Parker et comme d’habitude j’ai adoré. J’attends de lire ta critique à son sujet quand tu auras le temps.
Damned, je ne savais pas qu’il y avait un nouveau Connolly, je l’achète demain !
Pour Manotti tu peux commencer par les deux premiers dans la vie de Daquin, Or noir et Marseille 73.
Dans les premiers romans de Dominique Manotti, mes préférés sont sans doute Sombre sentier (avec Daquin), son premier roman, Lorraine Connection, et L’honorable société écrit à quatre mains avec DOA.
Ce doit être intéressant en tant que témoignage historique sur les années 73 à Marseille.,J’ai pas connu cette époque ,mais là,un passé sombre explique un présent sombre. Reste à savoir si le futur le sera aussi.
A lire après Or noir donc.
Oui, c’est mieux de lire Or Noir avant, même si ce n’est pas indispensable.
Je n’ai jamais lu de Manotti mais ça me donne très envie quand tu compares à Harvey, Mc Bain, Sjowaklle et Wahloo at autres Mankell. Par quel livre me conseilles-TU de commencer ?
Je dirais Sombre sentier ou Lorraine connection pour commencer.
Merci pour les conseils, je vais tenter sombre sentier
Tu me diras.
Merci pour votre chronique! J’ai beaucoup aimé ce roman, son sujet (d’une actualité toujours brulante), son style percutant, et ses personnages dont certains m’ont particulièrement touché, et pas forcément le principal en premier. Je pense surtout au « gros Marcel » et à la dignité du jeune assassiné. Indispensable dans la période.
Nous sommes bien d’accord.