Les éditions Agullo éditent, si je ne m’abuse, leur premier recueil de nouvelles Presqu’îles. D’un nouvel auteur, bien connu des amateurs de polars qui suivent les blogs qui comptent, Yan Lespoux.
Le médoc. Pas celui de Pauillac, Margaux ou Saint Julien. Celui qui ressemble aux Landes. Les pins, l’océan, le surf et les baïnes, le sable, les étangs, les petites villes, les potes qui survivent et tournent plus au pastis et à la Kro qu’au grand cru.
Chasse, champignons, cuites, petits casses minables, piliers de bistro, et tous ces étrangers, bordelais, toulousains ou horreur, parisiens. Mais même les charentais, ou ceux du village d’à côté ne sont pas vraiment d’ici. Et de temps en temps, un qui essaie de partir, à la ville, ailleurs, mais qui en général ne va pas très loin, ou revient vite.
Amitiés, racisme ordinaire, bêtise quotidienne, l’humidité qui ronge les os, la beauté d’une matinée parfaite sur l’eau, un coin à girolles bien caché, les bières partagées lors d’un concert inattendu.
Autant de portraits courts, incisifs qui parleront à tous, du moins je le suppose.
Vu du Béarn et du Pays Basque où j’ai grandi, ou de Toulouse où je vis, le Médoc ou Bordeaux, c’est pareil, les doryphores immatriculés 33 qui venaient nous envahir en été, des sortes de Parisiens, des nordistes (le Nord commence à l’Adour). Mais l’océan, les potes landais, les périodes de champignons, de chasse (il manque le pèle porc, et les cris du cochon les matins fin automne début hiver, il font pas ça dans le Médoc ?), l’océan, la certitude qu’être de l’intérieur ou de la côte c’est PAS DU TOUT PAREIL, que les bayonnais ils sont pas comme nous, … bref toutes ces particularités que Yan rend fort bien, qui paraissent si locales, elles me parlent.
Ce qui est drôle c’est qu’alors qu’il décrit des coins que je ne connais pas, ses textes m’ont remis en mémoire des visages, des moments, des dialogues, directement vécus, ou racontés par mes parents. Local et universel, au moins universel à l’échelle de la campagne du Sud-Ouest, mais sans doute au-delà, je vous laisse juges.
On lit, sourire aux lèvres, l’écriture chante, on entend les dialogues, et s’il ne fait pas de cadeaux et maltraite autant les locaux que les touristes ou les nouveaux arrivants, Yan le fait sans mépris, sans les prendre de haut, avec tendresse, humour et une certaine mélancolie.
Yan Lespoux / Presqu’îles, Agullo (2021).