Un auteur polonais chez Rivages, c’est rare. J’ai essayé Eblouis par la nuit de Jakub Zulczyk. J’ai détesté.
Jacek est dealer de cocaïne à Varsovie. Toute la nuit, et une bonne partie de la journée il parcourt la ville en voiture pour livrer ses clients. Contrairement à la majorité de ses collègues, Jacek fait profil bas. Il ne boit pas, ne consomme pas ses produits, ne s’achète rien d’ostentatoire, ne sort pas, ne fréquente pas les prostituées. Il investit son fric pour rester invisible et il accumule en prévision de vacances en Argentine.
Personne ne sait où il habite, il n’a pas d’amis, pas de couple, pas de vie. Quand un nouveau truand apparait en ville, son fragile équilibre commence à se fissurer, jusqu’à la chute inévitable.
Mettons tout de suite les choses au clair. Je ne dis pas que c’est un mauvais roman, et il est parfait dans sa forme et son fond, et sans doute en adéquation avec ce qu’a voulu l’auteur. Mais j’ai détesté, et je me suis copieusement ennuyé.
Essentiellement parce que plus de 500 pages à décrire le vide d’une vie de vendeur (que ce soit de cocaïne ou de chaussettes), qui n’a aucun lien social avec personne, aucune aspiration, aucune valeur morale (à part c’est vrai : on ne tape pas une femme, ce qui en fait le gène surtout quand c’est les autres qui le font) … c’est long, très long.
Plus de 500 pages à répéter à longueur de paragraphe que les polonais sont tous des cons, sans cervelle, sans culture, uniquement occupés à s’arnaquer et se voler, et à baiser des putes, boire de la vodka ou snifer de la cocaïne pour ceux qui en ont les moyens, c’est long. Ah j’oubliais, et toutes les polonaises sont des putes. Et en plus d’être long c’est au mieux discutable, au pire très con. A ma connaissance il n’existe pas de communauté aussi homogènement dépourvue de la moindre humanité.
Plus de 500 pages centrées sur un personnage qui a plus peur de vivre que de mourir, c’est long.
La question est sans doute, pourquoi suis-je allé au bout. Il me faut avouer que j’ai sauté de plus en plus de passages. Que ce soit les rêves de Jacek, ou ses monologues répétitifs où il se glorifie de son intelligence et crache sur ses compatriotes. Et je voulais voir si l’auteur allait enfin m’amener quelque part. Et bien non, c’est 500 pages de surplace, juste de plus en plus violent, ce qui ne l’a pas rendu moins ennuyeux.
Bref, c’est sans doute bien fait, mais j’ai détesté.Jakub Zulczyk / Eblouis par la nuit, (Ślepnąc od świateł, 2014), Rivages/Noir (2021) traduit du polonais par Kamil Barbarski.
Félicitations, car même si je ne suis pas du tout une lectrice de romans noirs, polars et autres, vous m’avez presque donné envie de lire ce livre pour comprendre ce qui a pu plaire suffisamment à d’autres pour qu’il soit publié, et même repris en traduction!
J’ai vu sur les blogs ce qui a plu, sensiblement la même chose que j’ai détesté, la capacité à décrire la noirceur. Mais de mon côté, la noirceur pure, sans nuance, sans empathie pour personne, sans tension … m’ennuie et même m’horripile. Je trouve que c’est trop facile, beaucoup plus que de trouver la part d’humanité qu’il y a chez la pire ordure.
As-tu aimé Moins que zéro et Américan psycho, de Bret Easton Ellis ? Il n’y a pas un personnage pour racheter l’autre. Le premier roman est assez court, mais l’autre est un pavé.
Non, tout ce qu’on m’en a dit m’a convaincu que c’est un auteur que je ne peux que détester.
Alors tu me donnes envie de tâter de Jakub Zulczyk, car j’aime beaucoup ces deux romans de BEE. 😉
J’ai cru comprendre des différents commentaires que c’est le même esprit.
Ta réponse sur Brett Easton Ellis conditionne forcément ton avis sur ce roman. Pour ma part, j’y ai vu, dans le marasme, une part d’humanité, de l’empathie et un traitement de l’horreur virtuose qui fait qu’on est entraînés dans son sillage. Une question de goût, c’est certain, et un roman noir particulièrement réussi pour moi.
Entièrement d’accord, d’ailleurs je ne dis jamais qu’il n’est pas réussi, juste que j’ai détesté.
On est d’accord et j’ai juste adoré.