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Saga revient !

Cela fait un bon moment que je ne vous cause pas de BD, et plus particulièrement de comics. Il y aurait beaucoup à dire.

Je pourrais vous causer de la fin magistrale de Ascender de Jeff Lemire et Dustin Nguyen. Les gouaches sont toujours aussi magnifiques et le final permet de boucler avec la première série Descender sans que la tension et l’intérêt narratif ne faiblissent un instant.

Pour passer de la gouache aux couleurs flashy je pourrai aussi citer, l’excellente série de SF Invisible Kingdom de G. Willow Wilson et Christian Ward qui se termine en trois volumes.

Parmi les chocs attendus, le second volume de la relecture iconoclaste de la bible par Jason Aaron et R. M. Guéra est sorti : The Godammed, Noces de sang. C’est toujours aussi rude et aussi bon.

Le privé de Ed Brubaker et Sean Phillips, Reckless est revenu pour un 2° et 3° tomes, et il y en aura d’autres parait-il.

Et une nouvelle série complètement parano et assez réjouissante, à condition de prendre le temps de la lire posément quand on a l’esprit reposé, Department of Truth a démarré très fort, avec un centre qui combat les théorie complotistes, centre dirigé par un certain Lee Oswald …

Mais alors me direz-vous, si je ne parle pas de tout ça, de quoi vais-je vous parler ? De la grosse nouvelle de ce mois d’octobre, enfin, après plus de 3 ans d’attente et des fans laissés sous le choc par la fin du tome 9, Saga revient ! Et visiblement, c’est reparti pour un bon rythme jusqu’à la fin.

Il est impossible de parler de l’intrigue sans révéler la fin du tome précédent, ce qui serait absolument criminel, si par le plus grande des hasards venaient ici des lecteurs qui sont encore dans la première partie de la série.

Sachez juste que nous retrouvons Hazel, trois ans après les événements, rebelle du haut de ses 11 ans. Les dessins sont toujours aussi magnifiques, l’imagination graphique (en termes de créatures bizarres) toujours au rendez-vous et l’art du découpage et de la mise en cases n’a pas faiblit d’un pouce. Ce qui donne des pages que l’on tourne fébrilement.

On retrouve immédiatement la familiarité avec des personnages que l’on avait pourtant quittés depuis plus de trois ans, et on est happé par l’histoire tant cela faisait longtemps que l’on attendait de savoir ce qu’il allait advenir de toute la tribu.

J’avais longtemps résisté à la lecture de ce que l’on pourrait beaucoup trop schématiquement présenter comme une version SF de Roméo et Juliette, j’y suis devenu complètement accro, parce qu’elle est belle, intelligente, qu’elle manipule l’émotion avec puissance et tact (en gros elle vous fait rire, rager et pleurer sans être lourde). Malgré trois longues années de sevrage, je m’aperçois que j’ai immédiatement replongé, avec un immense bonheur.

Et vivement la suite parce que les deux sadiques aux commandes terminent encore le volume sur un gros cliffhanger.

Jeff Lemire (scénario) et Dustin Nguyen (dessin) / Ascender Tomes 3 et 4, Urban Comics, traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

G. Willow Wilson (scénario) et Christian Ward (dessin) / Invisible Kingdom Tomes 2 et 3, HI Comics, traduits de l’anglais (USA) par Virgile Iscan.

Jason Aaron (scénario), R. M. Guéra (dessin) / The Goddamned / Noces de sang, Urban Comics (2017), traduit de l’anglais (USA) par Julien Di Giacomo.

Ed Brubaker (scénario) et Sean Phillips (dessin) / Reckless Tomes 2 et 3, Delcourt, traduit de l’anglais (USA) par Alex Nikolavitch.

James Tynion IV (scénario), martin Simmons (dessin) / Department of Truth Tomes 1 et 2, Urban Comics (2017), traduit de l’anglais (USA) par Maxime le Dain.

Brian K. Vaughan (scénario), Fiona Staples (dessin) / Saga T10, Urban Comics (2018), traduit de l’anglais par Jérémy Manesse.

Quelques idées de comics

Cela faisait un bon moment que je n’avais pas parlé de comics, et pourtant, je continue à en lire.

Commençons par l’inépuisable Jeff Lemire

Ascender continue, la quête de Mila, la gamine qui cherche le petit robot dans un monde soumis à la magie de la Mère va l’amener à retrouver quelques uns des personnages de la magnifique série Descender. Les dessins de Dustin Nguyen sont toujours superbes, les retournements de situation tiennent en haleine, le seul ennui c’est que maintenant il va falloir attendre la suite.

Il s’est ensuite attaqué à un des personnages les plus riches de l’univers des super héros dans Joker killer smile, avec Andrea Sorrentino au dessin.

Le docteur Ben Arnell est vraiment un mec bien. Psychiatre, père et mari aimant, il arrive à laisser ses problèmes de travail au bureau quand il retrouve sa famille. Ben est un excellent psychiatre, à l’écoute de ses patients, plein d’empathie. Il va en avoir besoin avec son malade le plus connu, Joker, enfermé à Arkham. Petit à petit, il pense progresser, entrer dans la folie du Joker, faire tomber ses barrières, mais en même temps, n’est-ce pas l’inverse qui se produit ?

Un scénario assez vertigineux qui amène le lecteur à douter de tout. On sombre dans la folie sans arriver à savoir quand on a commencé à perdre pied avec le bon docteur. Les dessins, bien sombres,  et la mise en page très variée concourent à créer ce vertige. Très impressionnant. Et pas de Batman ici pour sauver qui que ce soit … Un beau cadeau de Noël pour ceux qui aiment les ambiances sombres et tordues.

Pour finir une série de BD dont on parle depuis qu’elle a commencé à être adaptée sur Netflix : Locke and Key de Joe Hill et Gabriel Rodriguez.

L’histoire commence très mal pour la famille Locke. Le père Rendell est assassiné et la mère Nina violée par deux élèves du lycée où travaille le père. Suite au drame Nina et les trois enfants, Tyler l’ainé, Kinsey la seconde et le petit Bode déménagent dans une maison de famille à Lovecraft, Massachussetts. Là Bode va découvrir d’étranges clés et réveiller une entité peu aimable. Les enfants Locke vont devoir alors affronter les fantômes de la famille jusqu’à un final en forme de feu d’artifice.

Les dessins sont superbes, certaines planches particulièrement soignées et Joe Hill qui a vraiment le sens du suspense manie parfaitement les coups de théâtre et renversements de situation. Certes, on n’a pas là la puissance et la charge politique de comics comme Scalped ou Transmetropolitan, mais c’est une excellente histoire fantastique qui vous accroche dès les premières planches avec des personnages bien construits, de l’émotion et des séquences d’action très réussies. De heures de lecture agréables assurées.

Jeff Lemire (scénario) et Dustin Nguyen (dessin) / Ascender Tome 2, Urban Comics (2020), traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

Jeff Lemire (scénario) et Andrea Sorrentino (dessin) / Joker killer smile, Urban Comics (2020), traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

Joe Hill (scénario) et Gabriel Rodriguez (dessin) / Locke and Key Tome 1 à 6, HI Comics (2018 à 2019), traduits de l’anglais (USA) par Maxime Le Dain.

Le talent de Jeff Lemire

On peut légitimement se demander comment fonctionne le cerveau du scénariste Jeff Lemire, tant sa production est d’une richesse et d’une variété qui n’ont d’égales que sa qualité. Jugez plutôt.

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Je vous ai pas déjà parlé de la géniale série Descender, superbe scénario de SF magnifié par les aquarelles de Dustin Nguyen. Ceux qui l’ont lu, ont repéré un court chapitre qui relève plutôt de la fantasy, où la magie prend le pas sur la technologie.

Dix ans après la fin de Descender, dont je ne dirai que le strict minimum, nous voilà de retour dans le monde totalement changé de Ascender. Les robots ont donc disparus, la technologie avec, et les humains qui ont survécu vivent sous la coupe de La Mère, sorcière qui règne par la terreur. Une gamine qui vit à l’écart avec son père va trouver un étrange petit robot, ce qui, en soit, constitue un crime contre La Mère. Le début d’une fuite et d’une quête pour retrouver le mythique Tim 21, robot ressemblant à un garçon de 10 ans, qui pourrait réconcilier les hommes et les machines.

Démarrage sur les chapeaux de roues pour cette série. A la différence de la précédente, pas de suspense sur ce qu’il s’est passé avant (à moins de ne pas avoir lu Descender ce qui serait une faute impardonnable). Mais d’emblée des héros qui sont jetés dans l’eau glacée. Vont-ils s’en sortir ? Toujours ces aquarelles magnifiques, aussi impressionnantes dans l’évocation de créatures de fantasy qu’elles l’étaient dans celle des machines. Où comment se renouveler complètement dans la continuité. Superbe.

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Changement complet avec Royal City, série en trois volumes dessinée par Lemire lui-même et, on peut le supposer, fortement inspirée de sa propre histoire.

RoyalCity-01Royal City c’est la ville où vivent les Pike. Depuis toujours. Une ville sur le point de changer. Alors que le père se trouve à l’hôpital, victime d’une crise cardiaque, la famille va se retrouver, pour s’entraider ou mieux se déchirer. Patrick, écrivain, parti vivre ailleurs ; Tara qui voudrait que la ville change, alors que l’usine qui la fait survivre est en pleine déconfiture ; Richard, perdu dans l’alcool et le jeu. Tout le temps et partout présent, le fantôme de Tommy, mort alors qu’il n’était qu’un adolescent …

Scénario maîtrisant de façon virtuose un grand classique, à savoir les flashbacks et un double suspense (que c’est-il passé avec Tommy, que va-t-il se passer aujourd’hui). Le dessin qui ne cherche pas l’artifice épouse cette chronique de vie, où le destin d’une famille ordinaire fait écho à celui d’une ville ordinaire. Où l’on se passionne pour la vie d’une usine, des ouvriers qui y travaillent, pour les relations entre frères, entre parents et enfants. Pas de héros ou anti-héros, pas d’affreux ou de gentils, mais une exploration douce et intelligente de nos zones grises, de nos ombres mais aussi de nos lumières. C’est maîtrisé, très émouvant, cela semble très personnel et pourtant ce n’est pas de l’autofiction. Une très belle réussite dans le registre intime de Jeff Lemire dont je connaissais davantage le registre épique. Mais toujours, finalement, la famille et ses relations complexes au cœur du récit.

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Nouveau virage complet avec Gideon Falls où il explore l’horreur et le fantastique.

Gideon-02Norton Sinclair est un jeune homme perturbé. Il collectionne des bouts, de clous, du bois, des bouts qu’il trouve dans les poubelles et les caniveaux de la ville. Il a vu une grange noire, il sait qu’il faut absolument qu’il recrée une porte, bout par bout. La jeune docteur Xu qui le suit essaie de comprendre son délire et ses hallucinations. Jusqu’à ce que …

Ailleurs, à Gideon Falls le père Fred arrive pour remplacer le prêtre précédent, disparu. Et l’on parle, à demi-mots, de l’apparition et de la disparition d’une grange noire, liée à des morts sinistres. Il rencontre alors une communauté qui semble surveiller ces apparitions depuis longtemps.

Typiquement le type de série qui fait immédiatement monter l’angoisse et le mystère. On est happé par le scénario et le dessin très sombre. Qu’il est difficile d’attendre la suite ! Pour l’instant une série très addictive, bien glauque, du pur plaisir. Seule inquiétude, que la suite ne soit pas à la hauteur des expectatives que fait naitre ce démarrage foudroyant.

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Jeff Lemire (scénario) et Dustin Nguyen (dessin) / Ascender Tome 1, Urban Comics (2020), traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

Jeff Lemire (scénario) / Royal city Tome 1 à 3, Urban Comics (2018 à 2019), traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

Jeff Lemire (scénario), Andrea Sorrentino (dessin) et Dave Stewart (couleur)/ Gideon Falls Tome 1 et 2, Urban Comics (2018 et 2019), traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

Comics : Deux superbes fins de séries

Une petite chronique Comics pour deux excellentes séries qui se terminent, et la continuation d’une troisième.

Pour la continuation c’est Deadly Class de Rick Remember (scénario), Wes Craig (dessin) et Jordan Boyd (couleur) qui en est au 7° volume.

deadly-class-tome-7Si vous vous souvenez des épisodes précédents, on a suivi des ados dans une école un peu particulière qui les forme à être des assassins. On a quitté l’école avec la première promotion à la fin du 4, on en a trouvé de nouvelles promos dans les 5, 6 et 7, en en apprenant également un peu plus sur les familles mafieuses d’un certain nombre d’élèves, et là, pour le 7, c’est le grand dézingage, toutes les factions qui sont après nos survivants des deux promos (les yakuzas, les flics ripoux mexicains et les envoyés de l’école) vont se retrouver pour un épisode qui saigne sévère. C’est certain, beaucoup resteront sur le carreau.

C’est incroyable, on croit à chaque épisode qu’on ne peut plus accélérer et monter un cran dans la violence, et pourtant à chaque fois, les auteurs y arrivent. Cette fois, clin d’œil assumé, une voix off dit qu’on se croirait dans une BD de Franck Miller, ou un film de Tarantino, avec une référence évidente à Kil Bill. Ça pourrait lasser, et pourtant ça marche. Je suis complètement accro à cette espèce de machin survolté, qui est loin d’être terminé, qui nous offre quelques beaux coups de théâtre et retournements d’alliances, et laisse entrevoir une suite que j’attends avec impatience.

Les deux séries excellentes qui se terminent sont, le polar Kill or be killed de Ed Brubaker (scénario) et Sean Phillips (dessin) et Elizabeth Breitweiser (couleur) et la série SF Descender, de Jeff Lemire (scénario) et Dustin Nguyen (dessin).

kill-or-be-killed-04Vous vous souvenez peut-être de Dylan de Kill or be killed, un looser de la plus belle eau. Sauvé du suicide par un démon, il doit pour survivre tuer un nuisible par mois. Et il finit par y prendre goût, même si ça complique forcément ses relations avec son amie / amoureuse (ça fluctue), et avec la police de New York qui est à la poursuite du tueur à la cagoule. Et que dire de la mafia russe qui est à ses trousses. Dans ce volume 4 et dernier, il vient de découvrir que son frère, qui s’était suicidé, voyait aussi un démon, un démon qui apparaissait dans les dessins de son père. Tout va alors se dénouer dans l’hôpital psychiatrique où il est enfermé après … Mais pour le savoir il faut lire ce dernier volume.

Le scénario fait partie de ces histoires qui vous accrochent dès le début grâce à un point de départ très intrigant, que vous poursuivez avec bonheur, mais avec toujours derrière la tête la question de savoir si le final ne va pas être décevant, ou comment s’en sortir sans une pirouette un peu facile. Et bien ici pas de pirouette facile, le final est à la hauteur des attentes. Le dessin magnifique nous plonge toujours dans une atmosphère de film noir comme je les adore, et que dire de l’habileté du scénario. Tout au long de la série les auteurs ont eu le chic pour parfaitement doser les aller-retour présent, passé proche, pour faire monter le suspense, et le recours à la voix off du narrateur (Dylan) est génial. Vraiment une superbe série pour tous les amateurs de polars et d’ambiance de film noir.

Descender-01Descender se termine également. Dernier volume pour admirer les magnifiques aquarelles de Dustin Nguyen et là aussi énorme attente face à une série qui commence sur un choc et une question qui tend le fil de suspense pendant toute la suite : Qui sont ces robots monumentaux qui ont attaqué le monde et ont disparu ensuite, et quel rôle le petit Tim 21, robot de compagnie du jeune Andy joue-t-il dans ce mystère ? A la fin du volume précédent, les principaux protagonistes ont convergé vers une planète où vit le créateur de Tim et …

Et une fois de plus le final est superbe et tient toutes les promesses d’une histoire riche en rebondissements et questionnements. Aucune déception donc, et un final totalement cohérent. Là où les auteurs font très fort, c’est qu’ils concluent vraiment l’histoire, tout en laissant une ouverture pour raconter une autre histoire, complètement différente, mais néanmoins reliée. Chapeaux les artistes, et vivement la prochaine histoire !

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Rick Remember (scénario), Wes Craig (dessin), Jordan Boyd (couleur) / Deadly Class Tome 7, Urban comics (2019), traduit de l’anglais par Benjamin Rivière.

Ed Brubaker (scénario), Sean Phillips (dessin), Elizabeth Breitweiser (couleur) / Kill or be killed Tome 4, Delcourt 2019, traduit de l’anglais par Jacques Collin.

Jeff Lemire (scénario) et Dustin Nguyen (dessin) / Descender Tome 6, Urban Comics (2019), traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

Quelques BD

Ca faisait un moment que je n’avais pas causé BD, essentiellement parce que je n’avais pas essayé grand-chose de nouveau. Revoici donc, avec malheureusement une petite déception française, puis de très bonnes choses et un énorme coup de cœur.

La déception, non ce n’est pas le dernier Astérix (là ce n’est pas une déception, c’est une catastrophe, je l’ai trouvé indigent), c’est le volume 4 des Vieux Fourneaux : La magicienne, toujours de Wilfrid Lupano et Paul Cauuet.

VieuxFourneaux

Ça bataille ferme autour du village : L’entreprise locale a déposé un permis pour s’agrandir, permis accordé, mais depuis ça bloque, on a trouvé une espèce de sauterelle protégée sur le terrain en question qui a été transformé en ZAD. L’occasion pour les papis de la troupe Ni Yeux Ni maîtres de venir foutre le bordel, et d’appuyer les zadistes. Antoine lui est favorable à l’extension qui pourrait créer un peu de boulot, et Sophie qui se débat avec son théâtre de marionnettes, n’est pas insensible au charme d’un beau biologiste, et essaie de faire réparer son toit.

A priori, tous les ingrédients sont là. La mauvaise foi des uns et des autres, les papis indignes, les dialogues du bistrot, et la possibilité de mettre le souk. Et pourtant la mayonnaise ne prend pas, il manque un fil conducteur un peu tendu, il manque de la matière, tout se dénoue trop vite et trop facilement, grâce à un personnage qui n’a pas d’épaisseur. On arrive à la fin beaucoup trop vite avec l’impression d’avoir lu un épisode de transition. C’est certain, ou sourit souvent, on passe un bon moment, mais cela reste un cran en dessous des trois premiers.

Passons à ce qui est très bon :

Le premier … N’est pas une série. The private eye, de Brian K. Vaughan, Marcos Martin et Muntsa Vicente. Dans un futur plus ou moins proche, internet n’existe plus. Suite à une « explosion » du cloud, qui rendit publiques toutes les données privées, le chaos qui s’ensuivit a poussé les gouvernements à interdire internet et à mettre en place des mesures drastiques : Respect total de la vie privée, tout le monde se déplace avec un masque et se cache derrière un pseudo.

Seule une presse autorisée peut enquêter sur les gens. Détective privé (assimilé à paparazzi) est un des métiers les plus interdits et les plus infamants qui soit. C’est pourtant un Private Eye que nous allons suivre dans une affaire on ne peut plus classique : un jour une cliente entre dans son bureau. Sous le masque, une beauté fatale, qui lui demande, étrangement, d’enquêter sur elle-même, pour voir si sa vie privée est bien privée. Avant même le début de l’enquête, la cliente est tuée, et tout part en vrille.

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Excellente œuvre qui métisse un point de départ classiquissime (Un privé qui effectue une recherche pour une femme fatale qui meurt assassinée, et se retrouve ensuite client de la sœur de la victime), avec un monde de SF passionnant qui pose tout un tas de questions. Et s’offre le luxe de ne pas apporter de réponses, laissant le lecteur à sa réflexion.

Le fond de l’histoire nous interroge donc sur notre rapport à internet, à la perte de vie privée, en ayant la malice et l’intelligence de mettre en scène des jeunes horrifiés par l’étalage d’intimité qu’était internet avant l’explosion du cloud face à un grand-père nostalgique de l’époque des Ipad et des Iphone.

On réfléchit donc, mais pas tout de suite. Dans un premier temps, on est surtout embarqué par l’histoire policière, parfaitement rythmée et magnifiquement illustrée, dans des tons flashy, où les fonds unis et très colorés répondent aux masques des personnages. Superbe, prenant et intelligent.

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Pour la suite, malheureusement, vous allez me haïr, parce qu’on attaque de nouvelles séries (nouvelles pour moi, elles en sont à plusieurs épisode déjà traduits).

EastWest 01La première, East of West de Jonathan Hickman et Nick Dragotta est un excellent divertissement.

Quelque part dans le désert trois personnages émergent des sables. Ils auraient dû être quatre. Ce qui veut dire que Mort, le quatrième cavalier de l’Apocalypse leur a fait faux bond, et est devenu l’ennemi. Nous sommes dans une Amérique étrange : une météorite a mis fin à la guerre de Sécession, le pays en a été changé. Trois siècles plus tard, il est divisé en sept Nations dont les chefs, secrètement inféodés aux trois cavaliers restants, préparent la fin du monde.

C’est dans une esthétique de western spaghetti futuriste que les différents protagonistes vont s’affronter, et que l’on va découvrir (j’espère) petit à petit, ce qui anime les uns et les autres.

EastWest 02

Il y a (sauf erreur de ma part), 7 volumes publiés en France, j’en ai lu que 2, je ne peux donc proposer qu’un avis partiel. Première constatation, j’aime beaucoup le mélange de SF et de western, avec, s’il vous plait, une pincée de fantastique. C’est riche, et cela permet au dessinateur d’explorer quantité de décors, de cadrages, de personnages. De ce côté c’est un vrai plaisir.

La contrepartie étant qu’au début il faut s’accrocher. Le scénario multiplie les personnages, rien (ou très peu) n’est expliqué, et il faut accepter d’avancer à l’aveugle pendant une bonne partie du premier volume. Alors on commence à s’y retrouver, ce qui ne veut pas dire qu’on comprenne vraiment de quoi il retourne, mais on est moins perdu.

Une autre contrepartie étant que, si les thématiques et les personnages sont très très nombreux, cela se fait un peu au détriment de leur épaisseur. Moins d’émotion donc, mais plus de rebondissements. Au final, c’est beau, très accrocheur dans l’intrigue, et il me tarde de retourner chez mon dealer de BD pour attaquer la suite.

Je termine avec le coup de cœur, encore pour une série, de pure SF cette fois : Descender de Jeff Lemire et Dustin Nguyen.

descender 02Un jour, sans raison compréhensible, de gigantesque robots, surnommés les Moissonneurs sont apparus dans le ciel des neuf planètes du Conglomérat Galactique Unifié. Puis sont passés à l’attaque, ont tout dévasté, avant de disparaître, toujours sans raison. Dix ans plus tard, dans des mondes tentant de se reconstruire, de nombreux groupes se sont lancés dans une opération d’anéantissement des robots.

Le récit commence avec le réveil, sur une lune déserte, de Tim21, un petit robot en sommeil depuis plus de dix ans. Il a été conçu pour tenir compagnie à un jeune garçon, et devient l’objet le plus convoité du CGU : Sa signature de construction est la même que celle des Moissonneurs. La course est lancée pour le récupérer, entre des groupes qui ont des intérêts contradictoires.

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Magnifique début de série, dont je n’ai pour l’instant lu que 2 volumes sur les 4 disponibles en France. D’emblée l’intrigue accroche le lecteur qui avec les personnages, va chercher à comprendre d’où viennent ces Moissonneurs, et s’ils risquent de revenir. Des personnages inoubliables, les robots en tête, que ce soit le très humain Tim21, où les deux qui l’accompagnent, mais également tous ceux qui leur courent autour, chacun avec ses intentions cachées, ses secrets inavouables, ses fêlures.

descender_04Rien que pour ça, on a envie de continuer. Mais que dire des dessins ?

Le choix de l’aquarelle, à priori pas évident pour peindre des machines, des vaisseaux spatiaux et des robots, se révèle génial. Il adoucit l’histoire, met de la lumière et de la clarté dans les pages, se concentre sur les regards, les expressions, jetant un flou magnifique sur les décors. Les planches sont absolument superbes, au point que je suis retourné plusieurs fois en arrière juste pour les regarder, moi qui suis en général un lecteur vorace qui fonce au travers des histoires. Magique.

Wilfrid Lupano (scénario) Paul Cauuet (dessin) / Les vieux fourneaux : La magicienne (T4) Dargaud (2017).

Brian K. Vaughan (scénario), Martin Marcos (dessin) et Muntsa Vicente (couleur) / The private eye (The private eye, 2013), Urban Comics (2017), traduit de l’anglais (USA) par Jérémy Manesse.

Jonathan Hickman (scénario), Nick Dragotta (dessin) et Frank Martin Jr. (couleur) / East of West / La promesse (Tome 1) (The Promise, 2013), Urban Comics (2014), Nous ne sommes qu’un (Tome 2) (We are all one, 2014), Urban Comics (2014), traduits de l’anglais (USA) par Jérôme Wicky.

Jeff Lemire (scénario) et Dustin Nguyen (dessin) / Descender / Etoiles de métal (Tome 1) (Tin stars, 2015), Urban Comics (2016), Lune mécanique (Tome 2) (Machine Moon, 2016), Urban Comics (2016), traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

PS. Juste pour le plaisir quelques dessins juste pour me faire engueuler par la ministre de la santé. On pensait avoir touché le fond de la bêtise politique avec les Morano, Estrosi et compagnie, ben non, visiblement certains continuent à creuser.

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