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Les larmes du Reich

Sur les conseils avisés de blogs, d’amis et de libraires, j’ai tenté Les larmes du Reich de François Médéline, moi qui ne suis pas, a priori, fan de polars historiques. J’ai eu raison.

L’inspecteur Michel expie on ne sait quelle faute. Et c’est pour cela que c’est à vélo qu’en cette année 1951 il va enquêter depuis Lyon jusque dans la Drôme, à la recherche de la petite Juliette, 11 ans, disparue après le meurtre de ses parents dans une ferme isolée. Pas forcément bien accueilli par les gendarmes sur place, il s’aperçoit vite que ce couple était étrange et qu’il y a des secrets bien gardés.

Mais qui n’en a pas en ces années qui suivent la fin de la guerre ? L’inspecteur Michel lui-même n’en a-t-il pas ?

Voilà un roman étrange qui fait se poser tout un tas de questions au fil de la lecture. L’étrangeté, le bizarre s’insinuent petit à petit, de plus en plus fort, et on a l’impression de comprendre de moins en moins ce qu’il se passe, jusqu’à la dernière partie qui va tout éclairer.

Une belle construction qui demande un peu de patience et permet à l’auteur de décrire des faits peu connus, ou du moins que moi je ne connaissais pas. Mais je n’en dirai pas plus, ce serait dévoiler une bonne partie de l’intrigue, et ça ce serait un faute majeure.

Et écrire plus que « lisez-le » serait une autre faute tant toute indication pourrait gâcher le plaisir de la découverte finale.

François Médéline / Les larmes du Reich, 10×18 (2022).

Tuer Jupiter un livre politique ? Pas sûr.

Dans le cadre Toulouse polars du Sud, je participe avec 5 collègues et amis au prix des chroniqueurs, initié l’an dernier par Laurence de Evadez-moi. C’est dans ce cadre que je lis avec un peu de retard, Tuer Jupiter de François Médéline.

MedelineVous avez forcément déjà lu ici ou là de quoi il s’agit : Le 3 décembre 2018 Macron entre au panthéon. Il a été assassiné le 11 novembre. Du 3 décembre 2018 à fin 2017, où se décide l’assassinat, nous allons remonter le temps pour voir, à rebours, comment tout cela s’est passé, et comment et pourquoi les autoproclamés grands du pays et du monde ont réagi.

Alors, suis-je convaincu ? Pas complètement.

Côté positif il y a l’effet de surprise (amoindri il est vrai en lisant le roman bien après tout le monde), une plume alerte, vive, des scènes assez loufoques, une irrévérence envers ceux qui se prennent pour les rois du monde. J’ai lu assez rapidement, souvent avec le sourire aux lèvres. Le recours à Twitter est assez bien vu, certains portraits sont savoureux et il y a des traits d’esprit qui font mouche.

Mais ensuite, je me suis dit : So what ? Et oui. Pour commencer, si en Corée du nord, au Maroc, ou en Arabie Séoudite il doit être assez gonflé d’écrire un livre où on tue le chef, en France, on ne risque pas grand-chose. Mais ce n’est pas grave.

Je ferais deux reproches essentiels au roman.

Tout d’abord sa structure inutilement compliquée. Pourquoi cette marche arrière ? Pourquoi certains détours en cours d’intrigue ? Ca donne une impression de complexité, de construction savante, mais est-ce que ça apporte quelque chose ? Pour moi non.

Et surtout j’ai plus eu l’impression de lire une suite de sketchs qu’un vrai roman structuré. Deux sketchs avec Trump, bien trouvés, mais on sait déjà qu’il n’a pas inventé la machine à dénoyauter les pois chiches comme dit Oppel. Un avec Poutine. Quelques-uns avec le couple Macron, bien gentils d’ailleurs, quelques autres avec les ministres. Une jolie imitation du célèbre François Molins … Mais une série de sketchs, aussi réussis soient-ils ne fait pas un roman, et là ça manque de liant, et même de véritable intention. Ou du moins je ne l’ai pas vue.

Et puis, c’est bien de rendre hommage à Ellroy (même si je trouve dommage d’expliciter la référence en bas de page), et d’écrire une demi-page dans le style David Peace dans Rouge ou mort, mais l’exploit ce n’est pas de tenir une demi-page, c’est d’arriver à faire avaler ce style à un lecteur qui se fiche du foot pendant 500 pages ! Donc c’est sympathique, mais ça souligne quand même l’écart entre les deux auteurs.

Et c’est là qu’on s’aperçoit que, quand au travers du destin d’un homme public (en l’occurrence l’entraineur des Reds de Liverpool) David Peace décrit tout un peuple et toute une époque, avec Tuer Jupiter, François Médéline s’amuse à décrire quelques figures médiatiques qui m’intéressent assez peu. Que restera-t-il du roman quand tout le monde aura oublié les Macrons, Collomb, Larcher et autres Trump ? On pourrait me reprocher de faire cette comparaison qui n’a peut-être pas lieu d’être, mais c’est lui qui l’a cherchée !

Bref, amusant, sans plus. Mais c’est peut-être moi qui suis allergique aux Macron, Poutines et autres emplumés qui trônent ici et là. Plusieurs de mes collègues du prix des chroniqueurs ont vraiment apprécié.

François Médéline / Tuer Jupiter, La Manufacture des livres (2018).