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La grande pagode

Marcelo Silva, le journaliste créé par le portugais Miguel Szymanski, est de retour dans La grande pagode.

A la fin du volume précédent Marcelo Silva quitte son poste officiel et repart vivre à Berlin. C’est la mort d’une tante dont il hérite, et la maladie d’une ancienne compagne qui vont le ramener à Lisbonne. Soucieux d’échapper à ses ennemis, Marcelo se fait très discret. Il va cependant être repéré par des yeux attentifs. Et comme c’est le moment des grandes manœuvres entre allemands, américains et surtout chinois pour mettre la main sur le pays tout entier, certains ne croient pas au hasard et pensent que Marcelo vient encore mettre le bazar. Le revoilà au centre d’affaires de corruption et chantage qui le dépassent.

Autant le dire tout de suite, ce roman n’est pas fait pour les amateurs d’intrigues tordues et de détectives géniaux. Marcelo Silva est ici pris dans un maelstrom qui le dépasse totalement, et il subit les événements, au même titre que ses concitoyens.

Mais si vous aimez les polars pour les personnages qui les incarnent, pour la description d’une société, d’une ville ou d’un quartier, vous pouvez vous plonger dans La grande Pagode. L’auteur mène en parallèle les descriptions de deux mondes en apparence à l’opposé l’un de l’autre. Celui des grandes manœuvres politiques et économiques, et celui des quartiers populaires, voire ici d’un bidonville en marge de Lisbonne. Le lecteur découvre la cohérence du tout.

En suivant Marcelo, l’auteur réussit paradoxalement à montrer comment l’invasion par les touristes fait perdre à sa ville une partie de son âme, et à nous donner envie d’aller la visiter. Il ne pourra s’en prendre qu’à lui-même.

Le ton, comme dans le roman précédent est vif et mordant, on déguste les spécialités locales avec Marcelo, on apprécie la vue sur l’océan, on roule la nuit dans les rues de Lisbonne. Et on assiste aussi impuissants que les personnages, à la mainmise des économies les plus puissantes sur tout un pays.

Miguel Szymanski / La grande pagode, (O grande pagode, 2020), Les Arènes (2023) traduit du portugais par Daniel Matias.

Free Queens

Marin Ledun est de retour à la série noire avec Free Queens.

Quelques mois avant que le COVID ne bouleverse le monde la journaliste Serena Monnier se trouve avec les membres d’une association qui recueillent une jeune prostituée nigériane Jasmine Dooyum. Marquée par son témoignage, elle décide d’aller sur place, enquêter auprès des associations féministes qui se battent dans le pays.

Son travail l’amène à s’intéresser au nord du pays où une marque de bière bien connue exploite de jeunes femmes et les prostitue pour promouvoir la consommation de ses produits. Elle va s’apercevoir que dans cette zone où la corruption règne, son statu de journaliste européenne blanche ne sera pas suffisant pour la protéger.

Un sacré bon polar solide, documenté et enragé comme sait bien nous en offrir Marin Ledun. Il est en colère et révolté, cela se sent, mais il n’oublie jamais qu’il est aussi un auteur de polar et s’attache à construire de vrais personnages et à soigner son intrigue.

Un peu à la manière d’une Dominique Manotti, il s’appuie de toute évidence sur une solide documentation, nous instruit, mais reste un romancier. Free Queens n’est pas un essai, ni un pamphlet, ni une enquête journalistique. C’est un bon gros roman noir, avec du suspense, de la tension, des scènes d’action convaincantes, aucun angélisme, un regard très critique à la fois sur la corruption, sur le clientélisme local et sur le rôle dans ce système des sociétés européennes.  Et même sa journaliste, pourtant animée des meilleures intentions du monde se fait secouer.

Intelligent, salutaire et rageant.

Marin Ledun / Free Queens, Série Noire (2023).

Colombian Psycho

Revoici Santiago Gamboa et les personnages déjà rencontrés dans Des hommes en noir. Ils reviennent dans Colombian Psycho.

Bogota, l’hiver, il pleut. Il pleut beaucoup même. Et ce sont les torrents de pluie qui mettent à jour des ossements, deux bras et deux jambes. Mais où est dont le reste ? Là une première surprise de taille attend le procureur Jutsiñamuy. Dans une enquête qui va rapidement se révéler beaucoup plus complexe et dangereuse qu’il n’y paraissait, il va avoir besoin de l’aide de la journaliste Julieta et de son assistante, ancienne de FARC, Johana. Une enquête qui va remettre en lumière les années de guerre sanglante et les exactions des paramilitaires.

Attention, gros roman, bien dense, de presque 600 pages. On y croise des fous de dieu, une voyante, l’écrivain Santiago Gamboa, un pseudo chamane … Pourtant l’intrigue est bien maîtrisée et le lecteur suit facilement les méandres de l’enquête. On prend beaucoup de plaisir à retrouver des personnages surement représentatifs de la société colombienne mais qui sont assez inhabituels pour le lecteur français. Les personnages secondaires sont également très réussis. Les dialogues fonctionnent bien. Donc au premier degré de lecture c’est un plaisir.

Et puis il y a Bogota et la Colombie. Un pays qui n’a pas encore pansé ses blessures (et c’est bien normal, elles sont récentes). Un pays où l’armée ne semble pas avoir purgé ses liens avec les milices paramilitaires, un pays qui semble ne pas accepter totalement le processus de paix.

Et en même temps un pays qui ressemble à tant d’autres, où ceux qui ont le fric et le pouvoir en veulent toujours plus et se considèrent comme au-dessus des lois. A la fois lointain, exotique, et désespérément familier.

Santiago Gamboa / Colombian Psycho, (Colombian Psycho, 2021), Métailié (2023) traduit de l’espagnol (Colombie) par François Gaudry.

Double fond

Un roman à côté duquel j’étais passé lors de sa sortie, Double fond de l’argentine Elsa Osorio.

Marie Le Boullec, médecin à l’hôpital de Saint-Nazaire est retrouvée morte, noyée. Elle vivait seule depuis la mort de son mari, photographe, fils d’une famille connue dans la région. Muriel, jeune journaliste de la feuille de chou locale va se passionner pour cette femme dont elle va rapidement découvrir qu’elle était d’origine argentine, et que son identité avant son mariage était bien mystérieuse.

Et qui est Juana, ex guérillera de l’ERP puis montonera, ces mouvements d’extrême gauche des années 70 en Argentine victimes de la sanglante guerre sale menée par la junte de Vidella à partir de 76. Une femme qui fut prisonnière à l’école de Mécanique de sinistre mémoire, puis collabora pour sauver la vie de son fils. Héroïne ? Traitre ? C’est ce que l’on va peu à peu découvrir au travers d’une longue lettre qu’elle écrit à ce fils.

Et quel est le lien avec Marie Le Boullec ?

Attention grosse claque.

Ce n’est pas le plus important, loin de là, mais il faut quand même le dire, l’intrigue est parfaitement tricotée, tordue à souhait, vous baladant d’un côté à l’autre à vous rendre parano.

Mais ce sont surtout les personnages, et l’horreur décrite qui vont vous tordre les tripes. On a beau penser tout savoir sur la saloperie de la junte argentine, la torture, les disparus, les gamins volés, les mères de la place de Mai, la folie des militaires … le revivre décrit avec un tel talent vous remet un très grosse claque.

Et on en apprend encore. Sur la cupidité de ceux qui commandaient, sur leur arrogance, sur leur violence permanente, sur leurs tentatives pour apparaître aux yeux du monde comme des dirigeants « normaux ». Et on revit, pour les moins jeunes d’entre nous, ce mondial honteux de 78, où des foules de supporters sont allé faire la fête à moins d’un kilomètre d’un endroit où l’on pratiquait les pire tortures, certaines d’ailleurs enseignées aux argentins par des militaires français.

Un roman bouleversant, intelligent et sinistrement instructif.

Elsa Osorio / Double fond, (Doble fondo, 2017), Métailié (2018) traduit de l’espagnol (Argentine) par François Gaudry.

Les sentiers obscurs de Karachi

Olivier Truc quitte le grand nord pour Les sentiers obscurs de Karachi.

Le 78 mai 2002, un attentat devant l’hôtel où logent les ingénieurs et techniciens français de la Direction des Constructions Navales (DCN) qui travaillent au transfert de technologie et à la livraison de 3 sous-marins au Pakistan fait des dizaines de blessés et 14 morts, dont 11 ingénieurs français.

20 ans plus tard, alors qu’à Cherbourg on prépare les commémorations, les victimes savent que la vérité ne sera jamais faite sur cet attentat. L’enquête a révélé tout un système de corruption en France, mais les véritables coupables n’ont pas vraiment été recherchés. Jef Kerral, jeune journaliste au canard local, fils d’un employé de la DCN, et ami du fils d’une des victimes, Marc Dacian, qui a survécu, décide de partir sur place, rencontrer un ancien ami pakistanais de Marc, Shaheen Ghazali. Peu de temps avant l’attentat Shaheen avait mis Marc en garde en lui disant qu’il se tramait quelque chose de louche.

A Karachi il va vite se rendre compte qu’il est plus dangereux d’enquêter sur les services secrets pakistanais à Karachi que sur la fête du cidre à Cherbourg.

Roman intéressant, mais à mon avis moins abouti que les précédents romans de l’auteur. Et cela tient, à mon goût, à des personnages auxquels on croit moins et auxquels on s’attache moins qu’à ceux de Klemet et Nina. J’ai tout d’abord eu un peu de mal à croire à celui de Jef Kerral, spécialiste des fêtes dans les EPHAD locales qui, d’un coup, part enquêter à Karachi comme un vrai baroudeur. Et celui de Sara, sur place, aurait mérité d’être plus fouillé, c’était celui qui pouvait s’avérer le plus intéressant. Pour finir, les personnages secondaires manquent de complexité, trop tout blanc ou tout noir. Même si le méchant de service est assez réussi, ce qui, on le sait tous, est absolument indispensable.

Ceci dit le roman se lit quand même avec plaisir. La découverte de Karachi au travers du double regard du candide Jef et de la locale Sara est intéressant. Ce que l’on apprend de cette affaire pour le moins trouble est passionnant, et la résolution de l’intrigue arrive à être assez éclairante tout en ne recherchant pas le scoop improbable.

Intéressant donc surtout sur le fond, sans être le polar de l’année.

Olivier Truc / Les sentiers obscurs de Karachi, Métailié (2022).

Tu sais qui

Une excellente découverte chez Métailié, Tu sais qui du polonais Jakub Szamalek.

Julita voulait être journaliste. Elle se retrouve à pondre des articles putaclic pour un site de merde, à grands coups de : L’EFFROYABLE DECOUVERTE DE BIDULE, ou L’HORRIBLE SURPRISE DE TARTANPION.

Jusqu’au jour où, au détour d’une vidéo bien crapoteuse sur un accident, elle croit voir une incohérence et une petite possibilité de faire du vrai journalisme. Jusqu’à ce qu’un mystérieux correspondant lui intime l’ordre d’arrêter, la menaçant de la détruire. Julita l’envoie paître, ne voyant pas comment on peut la détruire sur le net. Erreur, grosse erreur, sa vie devient alors un enfer. Mais perdue pour perdue …

Excellente découverte donc. Qui offre, et c’est déjà très bien, un plaisir de lecture immédiat. Le style est enlevé, teinté d’humour, l’héroïne Julita très attachante et l’intrigue parfaitement menée. Plaisir de lecture au premier degré donc.

Mais ce n’est pas tout. La description des métiers de merde, abrutissants, comme celui de Julita qui pond à la chaine les articles les plus putassiers juste pour attirer les cons et les mener sur le pub. Ou les campagnes de marketing d’un autre des protagonistes pour des produits tous plus inutiles les uns que les autres est excellente.

Ajoutez la description de la société polonaise, de sa corruption, (qui ressemble fort à la nôtre par bien des aspects), et celle des conséquences de notre addiction à internet et de notre utilisation d’une technologie à laquelle, pour la plupart d’entre nous, nous ne comprenons rien et que donc nous ne maîtrisons absolument pas.

Au final vous avez un polar divertissant et instructif. Et joie, la suite est déjà annoncée, on retrouvera Julita.

Jakub Szamalek / Tu sais qui, (Cokolwiek wybierzesz, 2019), Métailié (2022) traduit du polonais par Kamil Barbarski.

Encore un bon film iranien

J’avoue que j’enchaine les machins pas très gais … Au cinéma cette fois avec un film iranien, Les nuits de Mashhad de Ali Abbasi.

Ville sainte de Mashhad en Iran. Un serial killer qui se croit appelé par Dieu a décidé de nettoyer la ville et de supprimer les femmes impures qui la souillent. Les morts se suivent et se ressemblent, la police ne semble pas être très pressée d’arrêter celui qui supprime des prostituées dont personne ne se soucie. C’est Rahimi, journaliste de Téhéran qui seule va venir s’intéresser à elles. C’est elle qui permettra l’arrestation du tueur.  Un film inspiré d’une histoire réelle.

Je suis un peu allé voir les « vraies » critiques, et j’avoue que ces gens me laissent perplexes. L’un par exemple dénie toute qualité au film sous prétexte qu’il se présente comme une critique de la façon dont l’état et la société iranienne traite les femmes, mais que d’après lui c’est en fait un film de serial killer. Et si c’était les deux à la fois ? On retrouve là, appliqué au cinéma, le mépris dans lequel une partie de la critique officielle tient le polar papier. Si ces gens sortaient parfois de leur petit monde auto satisfait, et auto persuadé d’être érudits, ils sauraient qu’on peut être à la fois un film (ou un livre) autour d’un serial killer ET une critique, ou une analyse de telle ou telle société. D’autre se plaignent de la violence. Mais damned, si on parle d’un homme qui étrangle des femmes, difficile de faire un film tout rose …

Bref, une fois cet énervement passé, sachez que le film est rude. Pas du tout complaisant ou esthétisant. Mais rude. Et pas seulement pour les scènes de meurtre. C’est toute la violence qui est faite aux femmes qui heurte le spectateur. Les meurtres, mais aussi les humiliations, les moments d’impuissance, le mépris, les menaces, l’attitude de toute une société qui soutient l’illuminé … C’est tout cela qui est parfois à la limite du supportable. Et encore heureux que ce soit insupportable.

C’est très bien joué, et même si on peut reprocher des effets convenus pour faire monter le suspense (c’est vrai qu’on a déjà vu ça maintes et maintes fois), le final est lui très réussi. Bref à voir, si vous avez le moral.

La chambre du fils

Jørn Lier Horst est un auteur solide. Son dernier roman traduit, La chambre du fils, le confirme une fois de plus.

Quand Bernhard Clausen, ancien membre influent du parti travailliste et ancien ministre meurt d’une crise cardiaque, ses anciens camarades décident d’aller voir dans son chalet s’il n’y a pas de papiers compromettants pour le parti. Et découvrent une fortune en devises étrangères. Averti le procureur général de Norvège confie l’enquête à l’inspecteur Wisting, en lui demandant de garder, un temps, le plus grand secret. Il lui laisse la liberté de constituer son groupe.

William Wisting décide alors de prendre dans son équipe un peu atypique sa fille Line, journaliste free-lance, pour l’aider dans certaines recherches. Sans savoir exactement quels secrets ils vont déterrer.

Je me répète donc, les romans de Jørn Lier Horst sont solides, la qualité scandinave. Par franchement Rock and Roll, mais du très bon travail de très bon artisan. De bons personnages que l’on a appris à aimer, une intrigue sans faille, un vrai sens du rythme, et toujours en toile de fond la description sans concession et sans illusion, mais également sans rancœur ni manichéisme de la société norvégienne.

Le genre de polar qu’il est bon d’avoir sur sa table de nuit pour les jours où on ne sait quoi lire, parce qu’avec lui on ne peut pas se tromper.

Jørn Lier Horst / La chambre du fils, (Det innerste rommet, 2018), Série Noire (2022) traduit du norvégien par Aude Pasquier.

Château de cartes

Miguel Szymanski, comme son nom ne l’indique pas, est portugais. Son premier roman traduit chez nous, Château de cartes, est, je l’espère, le premier d’une longue série.

Une fois n’est pas coutume, voici la fin des remerciements de l’auteur :

« Je remercie également pour leur inspiration les banquiers, les magnats de la finance et les politiques que j’ai croisés tout au long de mes vingt-cinq ans de journalisme, mais aussi les directeurs de publication à leurs ordres. Je pense surtout à ceux qui m’ont menacé, m’ont licencié et ont tenté de m’intimider ou de me faire taire. Certains d’entre eux ont connu la faillite, d’autres ont été démasqués ou ont fini en prions, mais la majorité est toujours là, décidant du destin du pays et des gens qui l’habitent ».

Marcelo Silva a été journaliste à Lisbonne. Il a dû partir et est allé exercer en Allemagne. C’est là qu’un procureur ami vient le chercher pour prendre la tête d’une unité de police spécialisée dans les crimes en col blanc. Marcelo sait d’expérience qu’il n’aura pas les mains aussi libres qu’on le lui promet, mais il accepte.

Dès son arrivée une affaire défraie la chronique. Un des banquiers en vue de la ville a disparu. Dans le même temps, les bruits courent que sa banque est en faillite et qu’il était une sorte de Madoff lisboète. Et Marcelo commence dès le début à subir des pressions. Mais l’homme a de la ressource, il connaît tous les milieux de la ville comme sa poche, et il va essayer, tant bien que mal, de faire surgir la vérité. Le laissera-t-on faire ?

Les remerciements cités en début de cette note ne laissent guère de place au doute, l’auteur est en colère, et il ne manque pas d’humour. Grinçant l’humour. Et Marcelo Silva lui doit sans doute beaucoup, du moins c’est que l’on peut supposer.

Le ton est vif, l’humour noir, et on suit avec beaucoup de plaisir Marcelo qui marche beaucoup dans sa ville bien aimée Lisbonne. C’est aussi avec grand plaisir qu’on l’accompagne de bars en restaurants pour faire un sort à de fort nombreuses bouteilles, et qu’on salive à ses préparations culinaires. Tout cela, ainsi que ses rencontres avec ses amis, donne de la chair à une enquête centrée sur le monde de la banque et de la finance qui aurait pu être désincarnée.

Un roman très documenté, sans illusion et sans concession, rageur et drôle, des personnages auxquels on s’attache, une belle promenade dans Lisbonne, des quartiers populaires aux lieux fréquentés par le gratin financier mais aussi culturel. Que demander de plus ? La suite bien entendu.

Miguel Szymanski / Château de cartes, (Ouro prata e silva, 2019), Agullo (2022) traduit du portugais par Daniel Matias.

La voix du lac

Je découvre Laura Lippman avec La voix du lac alors qu’elle a visiblement de nombreux romans à son actif. C’est plutôt raté pour moi.

1966, Maddie 37 ans, resplendissante, semble avoir une vie de rêve. Un beau mari, un fils, une belle maison dans le quartier juif chic de Baltimore. Et du jour au lendemain elle quitte tout ça, s’apercevant qu’elle a juste oublié de vivre. Elle décide qu’elle veut enfin faire autre chose de sa vie qu’être mère et épouse.

Elle aménage dans un petit appartement et devient assistante au courrier des lecteurs d’un des journaux locaux. Mais elle veut devenir chroniqueuse, et pour cela s’empare d’un fait divers qui n’intéresse absolument pas les lecteurs blancs de la ville : La mort de la très belle Cléo Sherwood, serveuse noire d’un bar de la ville, découverte dans un lac alors qu’elle avait disparu depuis des mois. Inexpérimentée et volontaire Maddie va mettre une belle pagaille.

Alors certes, comme le dit la quatrième, La voix du lac décrit une société américaine qui se déclare sans le moindre complexe raciste et sexiste. Mais cela suffit-il à en faire un « formidable roman à suspense » ? Pas franchement …

J’avoue que sans m’être complètement ennuyé, j’ai trouvé le roman très planplan. Mou du genou. Je n’ai pas accroché avec le personnage de Maddie, mais pas seulement. Je trouve que tous, autant qu’ils sont, manquent de force, de souffle, de vitalité. Je n’ai rien ressenti sinon une légère curiosité. Une curiosité qui m’a permis d’aller au bout des presque 400 pages du roman sans ennui, mais également sans émotion et sans impatience.

Mou du genou et pas vraiment indispensable donc de mon point de vue.

Laura Lippman / La voix du lac, (Lady in the lake, 2019), Actes Sud (2022) traduit de l’anglais (USA) par Hélène Frappat.