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Les ombres

Où l’on retrouve Mortka, alias le Kub, la Sèche, sa lieutenante, et toute la bande de flics, truands et pourris de Varsovie. Les ombres de Wojciech Chmielarz.

La femme et la fille d’un des truands de Varsovie disparu depuis des années et dont le cadavre avait refait surface récemment sont abattues chez elles dans la nuit. Sur place, l’arme de Darius Kochan, flic en disgrâce, ami du Kub, qui avait justement découvert le cadavre. L’homme que tout accuse est en fuite, mais Le Kub ne peut pas croire à sa culpabilité.

De son côté son adjointe, la Sèche, enquête seule et sans en avertir ses supérieurs sur une vidéo qu’elle a récupéré de façon illégale. On y voit un certain Lazare, lobbyiste de haut vol, participer avec quelques personnalités connues de la capitale au viol d’un jeune homme.

Le Kub et la Sèche vont devoir s’entraider pour essayer de faire valoir la vérité dans une société plus que jamais pourrie par la corruption.

Dans la note sur le précédent roman de la série, La cité des rêves, je disais que l’auteur s’améliorait de roman en roman et que ses personnages entraient dans la famille de ceux que j’aurai plaisir à retrouver. Je maintiens et confirme avec Les ombres. Wojciech Chmielarz a bien trouvé sa vitesse de croisière et maintient son excellent niveau.

On retrouve avec énormément de plaisir le Kub, son entourage, ses collègues mais aussi son meilleur ennemi. Les personnages sont riches, complexes, pleins d’aspérités et de contradictions, humains attachants, de vrais bons personnages récurrents. L’intrigue, touffue, est parfaitement menée, et converge vers un final explosif. Un vrai plaisir de lecture au premier degré.

Le portrait de la Pologne actuelle qui en ressort est, comme toujours dans les polars, à la fois sombre et malheureusement universelle avec sa description de la main mise financière sur tous les pouvoirs. Ceux qui ont l’argent, comme partout ailleurs, ont tous les pouvoirs. Celui de corrompre, celui d’échapper à toute forme de justice, celui d’acheter les plus fragiles qui n’ont que leur force de travail comme source de revenus.

Tristement universel. Heureusement, il y a des fous comme le Kub et la Sèche pour, rarement mais ça fait quand même plaisir, équilibrer un peu les comptes.

Wojciech Chmielarz / Les ombres, (Cienie, 2018), Agullo (2021) traduit du polonais par Caroline Raszka-dewez.

La cité des rêves

A chaque nouveau roman j’apprécie un peu plus le Kub et son auteur Wojciech Chmielarz. La cité des rêves les fait rentrer dans la famille de ceux dont je ne raterai plus aucune nouvelle aventure.

ChmielarzLa cité des rêves, un ensemble d’immeubles de luxe dans Varsovie, fermé, gardé. Rien ne devrait pouvoir y arriver à ceux qui ont les moyens de s’y loger. Pourtant c’est là qu’au petit matin un vigile découvre le cadavre d’une étudiante en journalisme.

Le cas semble simple, mais comme beaucoup d’habitants, du politicien écarté du pouvoir, au vigile pas net, en passant par l’homme de main du caïd de Varsovie et même certaines colocataires de la victime ont quelque chose à cacher les fausses pistes vont s’accumuler.

De son côté Dariusz Kochan, l’ex adjoint du Kub mis sur la touche pour avoir trop cogné son épouse revient au boulot et se voit confier les vieilles affaires non élucidées. Et si entre rancœur et envie de prouver qu’il existe il se mettait à faire des étincelles ?

Pour moi le meilleur de la série, et de loin, un très très bon. L’intrigue est merveilleusement tordue, tous les personnages excellents, qu’ils soient au centre de l’histoire ou en périphérie. Ils sont complexes, changeants, humains, attachants, horripilants …

Et surtout le tableau qui est peint de la Pologne actuelle est très riche, l’auteur réussit ce que peu de romans arrivent à faire, brasser de très nombreuses thématiques sans donner l’impression qu’il y en a trop, et que l’auteur aurait dû choisir.

Situation des immigrés (et oui, en Pologne aussi il y a des immigrés, aussi maltraités qu’ailleurs), arrogance de classe, violences faites aux femmes et aux enfants, corruption, individualisme et discours creux des jeunes loups, liens entre presse, politique et mafia … et tout ça sans lasser, sans donner de leçons et surtout sans simplifier ou caricaturer.

Vraiment une réussite superbe, et, cerise sur la gâteau, une fin qui laisse suffisamment de portes ouvertes pour appeler une suite. Comme les meilleurs romans de la série Harry Hole du grand Jo Nesbo. Vivement le retour du Kub.

Wojciech Chmielarz / La cité des rêves, (Osiedle Marzen, 2016), Agullo (2020) traduit du polonais par Erik Veaux.

La colombienne

C’est avec un peu de retard que je poursuis les aventures du Kub, flic polonais de Wojciech Chmielarz dans La colombienne.

ChmielarzMortka, dit le kub, est revenu à Varsovie après son incursion dans la campagne de La ferme aux poupées. C’est avec une nouvelle partenaire qu’il va devoir s’occuper d’un cadavre spectaculaire. Eventré, puis pendu sous un pont de la ville. Comme si cela ne suffisait pas, il a des doutes sur l’enquête menée par son ancien coéquipier à propos du suicide d’une femme. Et il se débat toujours avec son divorce. Dure période pour le Kub, qui risque de mettre sa patience, très relative, à rude épreuve.

J’avais raté le premier volume de la série, celui-ci, comme le second, est un bon exemple de procédural qui fonctionne et qui plait au lecteur de polar que je suis. Rien de révolutionnaire, mais, malgré ici quelques faiblesses dans l’intrigue (de mon point de vue très subjectif), tout ce que l’on recherche dans ce type de roman.

A savoir des personnages auxquels on s’attache, que l’on suit aussi bien dans leurs enquêtes que dans leur vie privée. Des histoires prenantes. Et un cadre de vie, un lieu, une époque, une ville, un pays que l’on peut découvrir. C’est bien le cas ici avec le kub et sa relation avec son ex-femme, les personnages secondaires dont on espère qu’on les reverra tant ils sont intéressants, la description d’une police qui semble en pleine évolution, où le fait de ne pas distribuer des baffes pendant un interrogatoire est une nouveauté parfois pénible, et un éclairage particulier sur l’arrivée du trafic de drogue en Pologne, mais aussi, comme dans le précédent, sur les violences faites aux femmes.

Plaisant et addictif, le Kub vient, en quelque sorte, prendre la place libre de Teodore Szacki sacrifié par son auteur Zygmunt Miloszewski.

Wojciech Chmielarz / La colombienne (Przejęcie, 2015), Agullo (2019), traduit du polonais par Erik Veaux.

Un nouvel enquêteur polonais

Après Miloswevski, je découvre un nouvel auteur polonais : Wojciech Chmielarz : La ferme aux poupées.

chmielarzL’inspecteur Mortka, de Varsovie, a été envoyé quatre mois dans une petite ville de montagne. Sous prétexte d’échange, en fait suite à une affaire qui s’est terminée dans la violence. Alors qu’il pense pouvoir passer quelques semaines tranquille, une petite fille disparait. Puis ce sont les cadavres mutilés de quatre femmes qui sont découverts.

Le séjour champêtre est terminé, et même si Mortka n’a aucun statut officiel, c’est sur lui que l’enquête va s’appuyer. Une enquête qui pourrait transformer la petite ville en poudrière quand elle commence à regarder du côté de la communauté rom, pas particulièrement bien vue par le reste de la population.

Voilà un polar solide qui ne va pas changer le monde, mais qui s’inscrit dans la tradition, en apportant sa touche personnelle.

La tradition c’est celle des polars procéduraux, où l’on suit un flic dans ses enquêtes mais également dans ses problèmes personnels. On s’attache très vite à Mortka, et on aura très plaisir à le suivre avec ses doutes, ses révoltes et son opiniâtreté dans de prochains volumes qui sont sans doute déjà écrits.

Les personnages secondaires sont aussi très réussis, flics d’une petite ville dépassés par une affaire dont ils n’ont pas l’habitude, enfermé dans un racisme ordinaire qu’ils partagent avec des concitoyens qu’ils connaissent tous ;

L’intrigue est très habilement menée, et le lecteur se laisse embarquer avec un très grand plaisir.

Et grâce à l’auteur nous découvrons un petit coin de Pologne, loin de la capitale, où le racisme anti roms est tellement installé qu’il ferait passer nos hommes politiques de droite et d’extrême droite pour des humanistes. Une province qui végète, se meurt peu à peu, avec tous les problèmes que cela suscite. Et un focus sur les violences faites aux plus faibles, souvent les mêmes, les femmes, jeunes et étrangères.

Plus que recommandable donc, en attendant le suivant.

Wojciech Chmielarz / La ferme aux poupées (Farma lalek, 2013), Agullo (2018), traduit du polonais par Eric Veaux.