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Le fils du père

Victor Del Arbol n’en finit pas de fouiller dans les traumatismes historiques de la société espagnole, dernier roman en date Le fils du père.

Diego est en prison, en attente de son procès. Un procès pour lequel il plaide coupable, il a torturé un homme pendant trois jours avant de la tuer. Comment ce professeur de littérature de Barcelone, installé, a pu en arriver à de telles extrémités. Nous allons remonter deux générations, dans un village d’Extremadura, à la fin de la guerre civile dans une famille brisée où la violence subie dans un premier temps se transmets de père en fils. Sans oublier les mères …

Dès son premier roman traduit, La tristesse du samouraï, Victor del Arbol est devenu un auteur marquant dont on attend avec impatience tout nouveau roman. Il a depuis acquis une réputation plus que méritée de grand d’Espagne. Une fois de plus, attendez-vous à être sacrément secoués par Le fils du père.

On retrouve des constantes de l’œuvre de l’auteur : explorer l’histoire du XX° siècle de l’Espagne, dans ce qu’elle a de plus sombre au travers de destins individuels. Ici nous suivrons des soldats engagés auprès des forces nazies dans la campagne de Russie, d’autres dans les casernes d’occupation du Sahara occidental, nous verrons les familles se déchirer à la fin de la guerre civile.

Il sera question du rôle trouble de l’église et de la vie dans une campagne où le gros propriétaire local a des droits quasis féodaux. Il sera question de l’impossibilité d’échapper à son passé, de la violence qui engendre la violence, de victimes qui deviennent bourreaux.

Tout cela au travers d’une trame magistralement répartie entre différents lieux et époques, différents protagonistes, avec des personnages torturés et magnifiques pour en arriver, à la toute fin, au point de départ, comment un professeur d’université se retrouve là où est Diego.

Encore une superbe réussite, sombre, âpre et bouleversante.

Victor Del Arbol /Le fils du père, (El hijo del padre, 2021), Actes Sud (2023) traduit de l’espagnol par Claude Bleton et Emilie Fernandez.

Avant les années terribles

Le dernier roman de Victor del Arbol, Avant les années terribles est publié dans la collection « blanche » d’actes sud. Détail, c’est toujours un excellent roman noir.

Isaïe vit à Barcelone. Il arrivé en Espagne à 17 ans, il est marié et Lucia son épouse attend un enfant. Une vie parfaite. Jusqu’à ce qu’un fantôme de son passé vienne à la porte de son atelier de réparation de vélos. Enmanuel K. fait aujourd’hui partie d’une commission de réconciliation dans leur pays d’origine l’Ouganda. Une apparition qui va obliger Isaïe à retourner dans ce pays où il a connu, et commis, les pires horreurs.

Attention, fini la légèreté et le sourire, avec les romans à venir j’attaque une série éprouvante avec ce roman. On se doute bien à la lecture du résumé ou de la quatrième, que le sujet des enfants soldats n’est pas de ceux qui prêtent à rire ou sourire.

Victor del Arbol le traite à sa manière, toujours humaine, avec sa façon de faire vivre aux lecteurs l’Histoire au travers d’histoires humaines, l’Histoire par les histoires. Et l’on retrouve son humanité, son refus permanent du manichéisme et de la simplification facile et confortable qui verrait s’affronter le bien et le mal.

Pas de chevalier blanc, pas de monstre non plus, mais l’interrogation permanente du lecteur : Comment aurais-je pu survivre à cela ? et comment aurais-je réagi ? Ajoutez la thématique très importante chez lui de la mémoire, et de la façon dont nous-même, falsifions notre propre mémoire, nos propres souvenirs pour les rendre plus acceptables.

Une fois de plus, au travers d’un récit parfaitement maîtrisé et de personnages complexes et attachants Victor del Arbol éclaire un pan de notre histoire récente et nous amène à réfléchir. A lire donc.

Victor del Arbol / Avant les années terribles, (Ante de los años terribles, 2019), Actes Sud (2021) traduit de l’espagnol par Claude Bleton.

Le poids des morts

Le nouveau Victor del Arbol n’est pas vraiment nouveau, c’est en fait son premier roman, publié en 2006. Le poids des morts.

DelArbolAutomne 1975, l’agonie de Franco n’en finit plus. Suite à un coup de téléphone, Lucía et son mari Andres quittent Vienne pour revenir dans la ville de Barcelone qu’ils avaient quitté il y a bien longtemps. L’occasion pour Lucía de régler ses comptes avec son passé, avec la mort de son père en 1945, avec l’enfer qu’elle a vécu adolescente à Barcelone.

Les fils d’une histoire vieille de plus de trente ans vont se renouer, pour le malheur de tous dans une ambiance de fin de règne sanglante.

Fallait-il traduire ce premier roman de Victor del Arbol ? J’avoue que je ne sais pas. Parce que si l’on y trouve déjà tout ce qui va faire son univers, on mesure aussi, quand on connaît les romans suivants, le chemin parcouru.

On trouve donc déjà sa façon de raconter l’Histoire en racontant des histoires individuelles, son souci de se pencher sur ceux qui ne sont que des silhouettes dans les livres. On retrouve les guerres, les moments de tension, Barcelone. Tout ce qui va caractériser les romans à venir.

Mais il lui manque, dans ce premier roman, un souffle, une puissance dans l’émotion, une façon de prendre le lecteur aux tripes pour ne plus le lâcher. Les outils sont là, la façon de construire le mystère, les intentions, mais sans que je puisse dire pourquoi, c’est moins puissant, moins prenant, moins émouvant.

A lire pour ceux qui veulent tout savoir de son œuvre, mais je ne conseillerais pas de commencer par là pour la découvrir.

Victor del Arbol / Le poids des morts, (El peso de los muertos, 2006), Actes Sud/Actes noirs (2020) traduit de l’espagnol par Claude Bleton.

Premier roman de l’année avec Victor del Arbol

C’est parti pour 2019, avec le nouveau roman de Víctor del Árbol, Par-delà la pluie.

DelArbolTarifa, à l’extrême sud de l’Espagne. Miguel, ancien chef d’agence bancaire, qui a toujours tout ordonné dans sa vie, se trouve face à un désordre intime qu’il ne peut maîtriser : un début d’Alzheimer. Veuf, il ne lui reste qu’une solution, entrer dans une maison de retraite. C’est là qu’il rencontre Helena, son opposé, femme sarcastique, flamboyante et rebelle. Contre toute attente, ils deviennent amis.

Suite à la mort d’un résident, ils décident tous les deux de partir sur la route, chacun avec son objectif. Miguel veut sortir sa fille Natalia d’une relation avec un pervers, et retrouver l’amour d’un week-end. Helena, elle, veut aller jusqu’à Malmö rendre visite à son fils qui ne vient jamais la voir. Ils ignorent qu’ils seront bien plus de deux pour ce voyage, tant chacun porte avec lui ses fantômes.

Une fois de plus Víctor del Árbol excelle dans l’exercice qui consiste à raconter l’histoire de personnes ordinaires prises dans la grande Histoire. Une fois de plus il tresse avec talent et humanité les destins d’êtres humains, parents, enfants, victimes et bourreaux, pris dans les tourbillons de l’histoire et des passions.

Un autre pourrait s’y perdre tant Par-delà la pluie brasse une multitude de thématiques. Les relations père-fils, la culpabilité face à l’histoire, la trahison, le sort des immigrés, le déchirement entre suivre ses rêves ou se conformer à la vie communément admise, la guerre d’Espagne et la défaite, la folie, la perte d’autonomie …

Et pourtant, jamais au long de ce roman dense, qui nous amène de Tanger à Malmö en passant par Séville, Barcelone et Madrid, jamais l’auteur ne nous perd. Grâce à la clarté de son écriture, à la richesse des personnages auxquels on s’attache immédiatement, à l’émotion qu’il transmet, dès les premières pages.

Encore un très beau roman de Víctor del Árbol, à la fois mélancolique, et porteur d’un certain optimisme tant il incite à profiter de la vie, à tout âge, quelles que soient les difficultés.

Víctor del Árbol / Par-delà la pluie (Por encima de la lluvia, 2017), Actes Sud/Actes noirs (2019), traduit de l’espagnol par Claude Bleton.

Le nouveau Victor del Arbol

En quelques romans, Victor del Arbol s’est imposé comme un des écrivains espagnols importants de ces dernières années. Il revient en ce début d’année avec La veille de presque tout.

delarbolL’inspecteur Ibarra est de retour en Galice après quelques années à Malaga. Des années qui se sont concluent par une affaire retentissante : l’arrestation du meurtrier de la petite Amanda, 10 ans. Un meurtrier que l’inspecteur avait abattu sur place lors de la découverte du corps. Mais les relations de la famille de la fillette avaient permis de le blanchir, même si aujourd’hui certains remettent en cause la version officielle.

Entre un fils gravement malade, un couple qui bat de l’aile, les images du meurtre qui l’empêchent de dormir et la campagne médiatique contre lui, Ibarra ne va pas bien. Cette nuit-là, une femme est admise aux urgences de l’hôpital de La Corogne, tabassée. Elle ne veut parler qu’à lui. Quand il la rejoint, c’est tout un passé qui revit, un passé qui plonge ses racines bien plus loin que l’affaire de Malaga.

La veille de presque tout a reçu en Espagne le prestigieux prix Nadal, et c’est génial pour lui, d’autant plus que ce prix n’est pas un prix polar mais un prix généraliste qui récompense la meilleur roman de l’année (petite parenthèse, ce n’est pas chez nous qu’on verrait un polar gagner un des multiples prix décernés tout au long de l’automne, fin de la parenthèse).

Mais, car il y a un mais, j’ai préféré le précédent Toutes les vagues de l’océan. Non que celui-ci soit mauvais, bien au contraire, mais le précédent est exceptionnel, magistral, renversant.

Attention, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, La veille de presque tout est un excellent roman noir, on y retrouve tout le talent de Victor del Arbol pour mêler les intrigues, les personnages, plonger les racines du mal présent dans un passé violent. On retrouve son écriture, dense, empathique dans sa description des tourments de personnages abimés, poétique et lyrique quand il décrit le déchainement de la nature sur la côté galicienne qui, et étonnamment pudique dans le rappel de traumatismes insupportables.

Sans chercher le coup de théâtre, en construisant un puzzle que l’on voit prendre forme petit à petit, il nous livre une nouvelle histoire de perdants, d’abimés, qui tentent, et parfois réussissent, à survivre, malgré des blessures ignorées par l’histoire officielle. Et il réécrit, inlassablement, les mythes et les légendes de notre imaginaire politique, leur donnant chair et complexité.

Victor del Arbol / La veille de presque tout (La víspera de quasi todo, 2016), Actes Sud/Actes noirs (2017), traduit de l’espagnol par Claude Bleton.

Restons sérieux !

Bon c’est pas tout ça mais on n’est pas là que pour rigoler.

Davet LhommeN’écoutant que son courage, votre blogueur préféré va vous parler du livre dont tout le monde médiatique cause, les confidences du Président.

 

 

 

 

Non je déconne ! Je ne lis que les bouquins présentant un minimum d’intérêt ! Des bouquins que je peux donner envie de lire à ceux qui passent par ici, des bouquins que j’ai envie de prêter, ou de faire lire, aujourd’hui ou plus tard, à mes enfants.

Je m’aperçois par contre que j’ai oublié de vous fournir une information sur le dernier festival Toulouse polars du Sud : C’est Victor del Arbol et son Toutes les vagues de l’océan qui a gagné le prix violeta Negra.

VictorDelArbol

Prix disputé puisqu’il était en « compétition » avec

  • Tant de chiens de Boris Quercia
  • Le plus jeune fils de Dieu de Carlos Salem
  • Puerto Apache de Juan Martini
  • Piste noire d’Antonio Manzini
  • La revanche du petit juge de Mimmo Gangemi.

C’est d’ailleurs le Gangemi qui avait été choisi par les lecteurs de la médiathèque de Toulouse qui avaient, de leur côté, participé au prix.

Voilà, ceux-là ils sont tous bien, le Victor del Arbol est excellent, et je suis enchanté pour lui.

 

Prix Violeta Negra

Je ne sais pas si je vous ai déjà parlé du prix Violeta Negra, décerné lors du festival Toulouse Polars du Sud et qui récompense un polar écrit dans une langue du sud. Pour être plus clair, pas en français, pas en anglais, pas en scandinave … En général en espagnol ou italien, avec parfois des incursions de grec, ou d’égyptien, ou de …

Tout ça pour dire que la sélection que va lire le jury est tombée.

Avec un espagnol : Toutes les vagues de l’océan de Victor del Arbol.

Un argentin presque espagnol : Le dernier fils de Dieu de Carlos Salem

Un argentin : Puerto Apache de Juan Martini

Un chilien : Tant de chiens de Boris Quercia

Et deux italiens :

Piste noire d’Antonio Manzini

Et La revanche du petit juge de Mimmo Gangemi.

Résultat en octobre prochain. Sachez qu’en 2015 c’est La ballade des misérables d’Aníbal Malvar qui avait gagné le prix.

VictorDelArbol  Salem-Dieu  Martini

Quercia  manzini   Gangemi