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Criminal

Comme on n’est jamais aussi bien servi que par soi-même je me suis fait un beau cadeau, les trois volumes de l’intégrale de la série Criminal de Ed Brubaker et Sean Phillips.

Au fil des histoires, dans une ville sous la coupe d’un caïd intouchable, où il pleut et il fait nuit plus souvent qu’à son tour, nous suivrons les histoires de plusieurs membres de la famille Lawless, et de ceux qui ont le malheur de croiser son chemin.

Les auteurs jouent avec les clichés : perdants pathétiques, prostituées, femmes fatales, ancien soldats, politiques et policiers corrompus … et en jouent très bien, au fil d’une série d’histoires où l’on va croiser er recroiser des silhouettes familières.

Il y a un petit côté Sin City dans les personnages que l’on devine perdus et perdants d’avance, avec le dessin totalement différent nous amène davantage vers les grands classiques du film noir.

Les fans de films et de romans noirs de la grande époque classique ne peuvent qu’être emballés par ces trois volumes, la qualité des intrigues, l’épaisseur des personnages, la beauté des planches.

Les compléments présents à la fin de chaque volume de l’intégrale sont magnifiques : couvertures alternatives, analyses des auteurs, esquisses de premiers dessins.

Un très beau cadeau à faire, ou à se faire.

Ed Brubaker (scénario) et Sean Phillips (dessin) / Criminal, (Criminal), Delcourt traduit de l’anglais (USA) par Alex Racunica et Doug Headline.

Lecture indispensable

Si je n’écris pas trop, c’est la faute à Yossorian. Sur son blog il nous souhaite la bonne année avec Le Sourire, l’immonde fils de pute de Transmetropolitan. Et ça m’a donné envie de le feuilleter de nouveau.

Or avec Transmetropolitan, il m’arrive la même chose qu’avec Le bon la brute et le truand. Si je commence, je ne peux plus arrêter, et je vais au bout. Quels que soient le jour, l’heure, l’occupation de départ …

Donc j’ai relu les 5 tomes et putain que c’est bon et que c’est juste. Certes Warren Ellis, aidé par le dessin magnifique de Darick Robertson force un tout petit peu le trait.

Mais on a déjà là, un Président immonde qui ressemble beaucoup au nôtre. Un mépris assumé pour les masses et un autoritarisme fascisant. Une police aux ordres qui n’hésite pas à tirer sur la foule. Mais aussi, si l’on lit bien, un système hospitalier à la rue, qui se débarrasse en particulier des malades psychiatriques en les mettant à la rue, des religions qui sont de plus en plus l’opium du peuple, des médias, télévision et media sociaux dont le seul objectif est d’abrutir le peuple et surtout de lui vendre, vendre et vendre …

Ce qu’on n’a malheureusement pas, c’est Spider Jerusalem aidé de ses sordides assistantes pour foutre un grand coup de pied las les couilles du système.

Mais bon sang, c’est tellement bon de se défouler en relisant le tout que, malgré tout, je commence l’année de bonne humeur. En prenant la résolution de relire les 5 tomes au moins une fois par an.

Quelques BD

Cela faisait un moment que je n’avais pas parlé de BD, et deux suites et fins magnifiques sont sorties il y a peu.

Commençons par le maintenant classique Blacksad de Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido avec Alors, tout tombe, seconde partie.

Toujours aux US, du côté de New York, Blacksad commence par assurer (sans grand succès) la sécurité du patron du syndicat des taupes qui creusent les tunnels alors qu’un homme (ou plutôt un faucon) d’affaire ambitieux veut faire passer la ville dans une autre dimension, détruire les services publics de transport et construire un pont grâce auquel son nom passera dans l’histoire. Blacksad une fois de plus à contrecourant, malgré la police, retrouvera de vieilles connaissances et devra tout mettre en œuvre pour sortir son ami journaliste Weekly d’une sale situation.

Les auteurs continuent à explorer l’histoire américaine au travers des aventures de leur privé hardboiled. On est cette fois du côté des romans de Thomas Kelly comme Le ventre de New York ou Les bâtisseurs d’empire pour ceux à qui la référence parle. Et après une petite baisse de régime des scénarii (surtout Amarillo qui était plus faible que les autres), les deux volumes de Alors, tout tombe retrouvent la qualité des premiers albums.

Quant au dessin, comme toujours, il est absolument magnifique, avec un grand sens du découpage et de la dynamique, des couleurs incroyables et quelques pages (dont une case pleine page) que l’on ne se lasse pas de regarder.

EXPRESSION@

Le second est la seconde partie de la reprise magnifiquement réussie du personnage du Marsupilami par Zidrou et Frank Pé : La bête.

Bruxelles dans les années cinquante. Franz vit avec sa mère Jeanne. Une vie pas facile d’autant que Franz est le fils d’un allemand dont sa mère état tombée amoureuse pendant la guerre. Alors Franz recueille tous les animaux blessés dont personne ne veut. Un cheval alcoolique, un sanglier, un couple de ragondins très très amoureux, sans compter chats, chiens et toutes sortes d’oiseaux. Jusqu’à trouver ce spécimen incroyable, une sorte de singe jaune à points noirs, avec une très longue queue. Pas commode, mais pas commode du tout la bête …

Première constatation, oui, ce sont deux gros albums assez chers et donc en cette période propice de superbe cadeaux de Noël, bien plus beaux et utiles que les derniers gadgets à la con.

Parce que déjà ce sont des objets somptueux. Papier magnifique, dessins incroyables, là encore il y a des planches que l’on ne se lasse pas de regarder. Et quelle interprétation du gentil Marsupilami. C’est le même que dans Spirou, on le reconnait, et pourtant il n’a rien à voir, c’est bien La Bête.

Et puis tout en admirant les planches incroyables, vous apprécierez les dialogues truculents émaillés d’expressions bien bruxelloises (enfin je suppose), et surtout vous aurez un aperçu de nature humaine, avec tout ce que les amateurs de polar aiment trouver dans les romans : des lâches, des bien pourris, des grands cœurs, des courageux … Tout pour une belle aventure humaine et animale.

Juan Díaz Canales (scénario) et Juanjo Guarnido (dessin) / Alors, tout tombe, seconde partie, Dargaud (2023) traduit de l’espagnol par Christilla Vasserot.

Zidrou (scénario) et Frank Pé (dessin) / La bête 2, Dupuis (2023).

Saga revient !

Cela fait un bon moment que je ne vous cause pas de BD, et plus particulièrement de comics. Il y aurait beaucoup à dire.

Je pourrais vous causer de la fin magistrale de Ascender de Jeff Lemire et Dustin Nguyen. Les gouaches sont toujours aussi magnifiques et le final permet de boucler avec la première série Descender sans que la tension et l’intérêt narratif ne faiblissent un instant.

Pour passer de la gouache aux couleurs flashy je pourrai aussi citer, l’excellente série de SF Invisible Kingdom de G. Willow Wilson et Christian Ward qui se termine en trois volumes.

Parmi les chocs attendus, le second volume de la relecture iconoclaste de la bible par Jason Aaron et R. M. Guéra est sorti : The Godammed, Noces de sang. C’est toujours aussi rude et aussi bon.

Le privé de Ed Brubaker et Sean Phillips, Reckless est revenu pour un 2° et 3° tomes, et il y en aura d’autres parait-il.

Et une nouvelle série complètement parano et assez réjouissante, à condition de prendre le temps de la lire posément quand on a l’esprit reposé, Department of Truth a démarré très fort, avec un centre qui combat les théorie complotistes, centre dirigé par un certain Lee Oswald …

Mais alors me direz-vous, si je ne parle pas de tout ça, de quoi vais-je vous parler ? De la grosse nouvelle de ce mois d’octobre, enfin, après plus de 3 ans d’attente et des fans laissés sous le choc par la fin du tome 9, Saga revient ! Et visiblement, c’est reparti pour un bon rythme jusqu’à la fin.

Il est impossible de parler de l’intrigue sans révéler la fin du tome précédent, ce qui serait absolument criminel, si par le plus grande des hasards venaient ici des lecteurs qui sont encore dans la première partie de la série.

Sachez juste que nous retrouvons Hazel, trois ans après les événements, rebelle du haut de ses 11 ans. Les dessins sont toujours aussi magnifiques, l’imagination graphique (en termes de créatures bizarres) toujours au rendez-vous et l’art du découpage et de la mise en cases n’a pas faiblit d’un pouce. Ce qui donne des pages que l’on tourne fébrilement.

On retrouve immédiatement la familiarité avec des personnages que l’on avait pourtant quittés depuis plus de trois ans, et on est happé par l’histoire tant cela faisait longtemps que l’on attendait de savoir ce qu’il allait advenir de toute la tribu.

J’avais longtemps résisté à la lecture de ce que l’on pourrait beaucoup trop schématiquement présenter comme une version SF de Roméo et Juliette, j’y suis devenu complètement accro, parce qu’elle est belle, intelligente, qu’elle manipule l’émotion avec puissance et tact (en gros elle vous fait rire, rager et pleurer sans être lourde). Malgré trois longues années de sevrage, je m’aperçois que j’ai immédiatement replongé, avec un immense bonheur.

Et vivement la suite parce que les deux sadiques aux commandes terminent encore le volume sur un gros cliffhanger.

Jeff Lemire (scénario) et Dustin Nguyen (dessin) / Ascender Tomes 3 et 4, Urban Comics, traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

G. Willow Wilson (scénario) et Christian Ward (dessin) / Invisible Kingdom Tomes 2 et 3, HI Comics, traduits de l’anglais (USA) par Virgile Iscan.

Jason Aaron (scénario), R. M. Guéra (dessin) / The Goddamned / Noces de sang, Urban Comics (2017), traduit de l’anglais (USA) par Julien Di Giacomo.

Ed Brubaker (scénario) et Sean Phillips (dessin) / Reckless Tomes 2 et 3, Delcourt, traduit de l’anglais (USA) par Alex Nikolavitch.

James Tynion IV (scénario), martin Simmons (dessin) / Department of Truth Tomes 1 et 2, Urban Comics (2017), traduit de l’anglais (USA) par Maxime le Dain.

Brian K. Vaughan (scénario), Fiona Staples (dessin) / Saga T10, Urban Comics (2018), traduit de l’anglais par Jérémy Manesse.

Deux beaux héros hardboiled en BD

Cela fait un bon moment que je n’ai rien écrit sur les BD que je lis. Par flemme essentiellement, mais aussi parce que je ne trouve pas aussi facilement les arguments pour vous convaincre. Une petite exception cependant pour deux excellents polars, dont l’un n’a vraiment pas besoin de moi.

Commençons par celui-là justement, l’incontournable 6° tome des aventures du privé le plus souple et félin du monde polar, j’ai nommé BlackSad de Juan Diaz Canales et Juanjo Guarnido. Il revient, enfin, avec Alors, tout tombe, première partie.

BlackSad est contacté pour protéger une taupe, patron du syndicat des travailleurs du métro et de ses souterrains. Le maire de la ville met le paquet sur les ponts et la voiture et délaisse complètement les transports en commun et la taupe a appris qu’un contrat avait été mis sur sa tête, peut-être par la mafia des belettes. Des profondeurs des tunnels aux magouilles de haut vol des plus riches de la ville, en passant par le milieu du théâtre, notre matou préféré va encore trancher la société dans le vif, de haut en bas.

Superbe hommage au film et au roman noir, magnifique utilisation des clichés, dessins somptueux que demander de plus ? Juste qu’on n’attende pas 8 ans pour avoir la suite. Petit conseil, inspiré par ce volume, le récit qui tourne, entre autres, autour des travailleurs souterrains et des affrontement syndicat / mafia m’a refait penser à l’excellent roman de Thomas Kelly, Le ventre de New York que je vous recommande chaudement, si on le trouve encore.

Deux autres auteurs qui connaissent parfaitement et aiment le roman et le film noir, et qui savent parfaitement jouer avec ses codes sont les deux américains Ed Brubaker et Sean Phillips, auteur, entre autres, du superbe Fondu au noir. Les voilà avec le premier tome d’une trilogie, mettant en scène un personnage hardboiled dans la meilleure tradition : Reckless.

Ethan Reckless était membre d’un groupe politique d’extrême gauche quand il était étudiant. Jusqu’à l’explosion d’une bombe qu’ils préparaient qui l’a laissé sans souvenirs de quelques jours, et surtout dans l’incapacité à ressentir la moindre émotion. Depuis il exploite un vieux cinéma avec une assistante. Mais il a aussi une autre activité, arrivée un peu par hasard. Son numéro de téléphone est connu dans certains cercles, et si on a un problème auquel on ne veut pas mêler la police, on peut appeler ce numéro. Suivant la nature du problème, Reckless peut décider de s’en occuper. Jusqu’à ce que son passé le rattrape, et qu’une ancienne connaissance fasse appel à lui.

Construction et thématiques archi classiques pour les amateurs de privés dur à cuire. Mais le classique, quand c’est bien fait, c’est le pied. Et là c’est très bien fait. Découpage impeccable, distillation fine des éléments du passé de Reckless, maîtrise parfaite du suspense et des coups de théâtres, et une mise en page et un dessin qui rappellent et rendent hommage de bien belle façon aux grands du film noir. Le pied disais-je. J’attends le tome 2 (chaque aventure est indépendante) avec une grande impatience.

Juan Diaz Canales (scénario) et Juanjo Guarnido (dessin) / Blacksad / Alors, tout tombe, première partie, Dargaud (2021), traduit de l’espagnol par Christilla Vassero.

Ed Brubaker (scénario) et Sean Phillips (dessin) / Reckless, Delcourt (2021), traduit de l’anglais (USA) par Alex Nikolavitch.

BD de début d’année

Commençons l’année avec quelques BD, Noël ayant été propice aux cadeaux (certains étant des auto-cadeaux), voici le bilan.

Les papis de Wilfrid Lupano et Paul Cauuet ont toujours la papate, et cette fois ils vont aller mettre le souk en Guyane dans L’oreille bouchée. Cela ne va pas aller sans ronchonneries, surtout du côté de Pierrot. C’est Mimile et son copain retrouvé Errol qui invitent Pierrot et Antoine, sans leur dire de quoi il s’agit. On se doute qu’il ne s’agit pas seulement de faire du tourisme … C’est toujours aussi drôle, enragé, engagé. Avec ce voyage les auteurs on trouvé le moyen parfait de mettre en scène la mauvaise humeur et la mauvaise de foi de Pierrot, donc on rit beaucoup, et on rit intelligent. Que demander de plus.

Côté comics, Jeff Lemire a encore sévi, avec une histoire « one shot » comme on dit en français : Sentient, en collaboration avec Gabriel Walta. A bord du USS Montgomery, une vingtaine de familles parties d’une Terre à bout de souffle sont en route vers une des lointaines colonies. Juste au moment où le vaisseau rentre dans une zone où les communications sont impossibles, un des voyageurs, membre d’un groupe séparatiste tue tous les adultes. Les enfants vont se retrouvés livrés à eux-mêmes, en compagnie de l’IA du vaisseau, Valérie, qui va devoir dépasser sa programmation pour leur permettre d’arriver à bon port. Très beaux dessins dans des tons pastels, gris et bruns, sauf à un moment crucial du récit où l’on passe à des couleurs plus primaires, pour une jolie histoire d’amitié et de parentalité de substitution.

Du pastel je suis passé au vraiment flashy avec le début d’une série de SF Invisible Kingdom de G. Willow Wilson et Christian Ward. Quelque part dans l’espace, Grix est pilote sur un vaisseau qui livre les commandes de la toute puissante société Lux. Loin de là, Vess vient juste de rentrer dans les ordres de l’Enseignement de la Renonciation, qui combat, entre autres et surtout, le consumérisme prôné par Lux. Quand chacune de son côté découvre que Lux verse de très grosses sommes tous les mois aux sœurs elles deviennent toutes les deux très très gênantes. Comme elles refusent de se taire, leur tête est mise à prix, et la chasse est lancée. Un propos intelligent, des thématiques plus qu’actuelles (entre les lanceurs d’alerte, le poids des géants du commerce tel Lux, l’hypocrisie des institutions religieuses …), des dessins impressionnants qui vont vous en mettre plein la vue, et une narration parfaitement maîtrisée, voilà un démarrage de série qui promet.

J’ai complété tout cela avec du Garth Ennis, vous voyez qui s’est ? Non ? Le scénariste de Preacher. La première BD n’a rien à voir. D’après mon dealer de comics qui sait TOUT, c’est un autre versant que l’on ne connaît pas ici du génial scénariste, qui est un grand spécialiste de la seconde guerre mondiale. C’est là qu’il situe Sara, dessiné par Steve Epting. Pendant le siège de Leningrad, en plein hiver, un groupe de snipers soviétiques décime les troupes nazies. Un groupe de femmes. La plus douée, Sara. Soumise à pression des combats, au froid, et à la surveillance constante des commissaires politiques Sara marche sur le fil et doit vivre avec ses fantômes. Superbe dessin, construction au cordeau, reconstruction historique impressionnante, suspense parfaitement maîtrisé et un final magnifique. Une réussite exceptionnelles qui emporte, même ceux qui, comme moi, ne sont pas du tout fan, a priori, de roman ou BD sur la guerre.

Et pour finir, toujours du Garth Ennis de l’ancien, du vieux et réchauffé, dans la veine trash et iconoclaste, associé cette fois à Darick Robertson qui est le dessinateur de Transmetropolitan. J’ai commencé doucement avec les trois premiers volumes de The Boys qui titrent : Ca va faire très mal ! puis Ca va saigner et Dis comme ça. Bien entendu, j’irai au bout de la série très bientôt. Dans un futur parallèle les super héros existent. Ils sont le produit d’une entreprise d’armement qui a créé les 7, les plus puissants d’entre eux. Puis ici et là des aspirants supers se sont regroupés en ligues. But, gagner plein de tunes avec les pubs, les films les comics … et pour la firme, infiltrer au mieux le gouvernement américain pour récupérer les contrats d’armement. Face à eux la CIA qui parfois se réveille a créé The Boys, ceux qui sont là pour surveiller les surveillants, et leur mettre des limites. Il faut dire que les Super en général, et les 7 en particulier sont très puissants, mais aussi très cons, obsédés, et particulièrement nuisibles. The Boys c’est Butcher et son dogue qui ne répond qu’à un ordre : « Nique », Le français, La crème, La fille et un écossais récemment arrivé Hughie. Dire que leurs méthodes sont conventionnelles et que les auteurs font toujours preuve de bon goût, de retenue et de politiquement correct serait mentir. Et putain que c’est bon ! Certes il y a parfois quelques moments un peu plus faibles, mais l’ensemble est tellement provocateur, iconoclaste, dézingueur de mythes et en même temps tellement vrai que c’est une jubilation constante. A lire pour tous ceux qui aiment les BD qui secouent la pulpe.

Wilfrid Lupano (scénario) Paul Cauuet (dessin) / Les vieux fourneaux : L’oreille bouchée (T6) Dargaud (2020).

Jeff Lemire (scénario) et Gabriel Walta (dessin) / Sentient, Panini Comics (2020), traduits de l’anglais (USA) par Khaled Tadil.

G. Willow Wilson (scénario) et Christian Ward (dessin) / Invisible Kingdom, HI Comics (2020), traduits de l’anglais (USA) par Virgile Iscan.

Garth Ennis (scénario) et Steve Epting (dessin) / Sara, Panini Comics (2020), traduits de l’anglais (USA) par Thomas Davier.

Garth Ennis (scénario) et Darick Robertson (dessin) / The boys, volumes 1 à 3, Panini Comics (2015 et 2016), traduits de l’anglais (USA) par Alex Nikolavitch.

Quelques idées de comics

Cela faisait un bon moment que je n’avais pas parlé de comics, et pourtant, je continue à en lire.

Commençons par l’inépuisable Jeff Lemire

Ascender continue, la quête de Mila, la gamine qui cherche le petit robot dans un monde soumis à la magie de la Mère va l’amener à retrouver quelques uns des personnages de la magnifique série Descender. Les dessins de Dustin Nguyen sont toujours superbes, les retournements de situation tiennent en haleine, le seul ennui c’est que maintenant il va falloir attendre la suite.

Il s’est ensuite attaqué à un des personnages les plus riches de l’univers des super héros dans Joker killer smile, avec Andrea Sorrentino au dessin.

Le docteur Ben Arnell est vraiment un mec bien. Psychiatre, père et mari aimant, il arrive à laisser ses problèmes de travail au bureau quand il retrouve sa famille. Ben est un excellent psychiatre, à l’écoute de ses patients, plein d’empathie. Il va en avoir besoin avec son malade le plus connu, Joker, enfermé à Arkham. Petit à petit, il pense progresser, entrer dans la folie du Joker, faire tomber ses barrières, mais en même temps, n’est-ce pas l’inverse qui se produit ?

Un scénario assez vertigineux qui amène le lecteur à douter de tout. On sombre dans la folie sans arriver à savoir quand on a commencé à perdre pied avec le bon docteur. Les dessins, bien sombres,  et la mise en page très variée concourent à créer ce vertige. Très impressionnant. Et pas de Batman ici pour sauver qui que ce soit … Un beau cadeau de Noël pour ceux qui aiment les ambiances sombres et tordues.

Pour finir une série de BD dont on parle depuis qu’elle a commencé à être adaptée sur Netflix : Locke and Key de Joe Hill et Gabriel Rodriguez.

L’histoire commence très mal pour la famille Locke. Le père Rendell est assassiné et la mère Nina violée par deux élèves du lycée où travaille le père. Suite au drame Nina et les trois enfants, Tyler l’ainé, Kinsey la seconde et le petit Bode déménagent dans une maison de famille à Lovecraft, Massachussetts. Là Bode va découvrir d’étranges clés et réveiller une entité peu aimable. Les enfants Locke vont devoir alors affronter les fantômes de la famille jusqu’à un final en forme de feu d’artifice.

Les dessins sont superbes, certaines planches particulièrement soignées et Joe Hill qui a vraiment le sens du suspense manie parfaitement les coups de théâtre et renversements de situation. Certes, on n’a pas là la puissance et la charge politique de comics comme Scalped ou Transmetropolitan, mais c’est une excellente histoire fantastique qui vous accroche dès les premières planches avec des personnages bien construits, de l’émotion et des séquences d’action très réussies. De heures de lecture agréables assurées.

Jeff Lemire (scénario) et Dustin Nguyen (dessin) / Ascender Tome 2, Urban Comics (2020), traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

Jeff Lemire (scénario) et Andrea Sorrentino (dessin) / Joker killer smile, Urban Comics (2020), traduits de l’anglais (USA) par Benjamin Rivière.

Joe Hill (scénario) et Gabriel Rodriguez (dessin) / Locke and Key Tome 1 à 6, HI Comics (2018 à 2019), traduits de l’anglais (USA) par Maxime Le Dain.

Ciao Quino

Putain il ne manquait plus que ça dans cette période de merde. Même Quino nous lâche. Il laisse une Mafalda plus d’actualité que jamais orpheline.

Pour l’humour fin, subtil, tendre mais sans pitié, on n’avait déjà plus Serre, il ne reste plus que Sempé. Merci pour tout, on relira l’intégrale de Mafalda, et on affichera les dessins sur les murs.

Pour vaincre le coup de mou

J’ai du mal à lire les parutions récentes, surtout françaises j’avoue. Du moins celles que j’ai entre les mains actuellement. En général bien écrit, voire très bien, rien à redire, mais un peu étriqué, centré sur la famille, restreint à un petit périmètre. Et en ce moment, la famille ça va, on la voit, on est tout le temps les uns sur les autres, et les petits périmètres on pratique. J’ai besoin de lire du Bigger Than Life.

Spider 01

Alors j’ai relu Transmetropolitan. C’est ma troisième lecture de ce monstre, je me suis encore éclaté. Putain que c’est méchant mais que c’est juste et visionnaire. Dire que cette BD a plus de 20 ans. J’adore Spider, j’adore son immonde chat, j’adore ses sordides assistantes. Je les aime pour des moments comme ça :

« Aujourd’hui, il y a une nouvelle religion toutes les 35 minutes. Et pourtant, étrangement, les lance-flammes sont toujours illégaux. Il n’y a pas d’équilibre dans ce patelin. »

Ou

« Lorsque notre correspondant a interrogé Jerusalem sur son article, celui-ci a ri, lui a écrasé une bouteille sur la tempe et nous a tous invités à lui sucer la bite. »

Ou

« Juste un petit rappel : Quand je parle des damnés, de la racaille, des gens qui n’en ont plus rien à cirer, des gens qui font semblant de ne pas voir la misère dans les rues, des gens qui se fichent de qui dirige ce pays … Quand je parle de la lie de la Ville … je parle de vous. »

Spider 02

Avec un dessin aussi enragé et engagé que le texte. C’est bon. Spider reviens, on a besoin de toi.

Spider 03

Ciao Albert

Et merde, avec tout ça j’ai raté l’info hier. Albert Uderzo est mort. Ca faisait longtemps qu’on était orphelin de René Gosciny, on est vraiment tout seuls maintenant. Juste au moment où on aurait bien besoin de rigoler un peu.

Merci pour tout.

Uderzo Fin