L’été c’est aussi l’occasion de rattraper des romans qu’on a laissé passer. Dont cette Histoire universelle des hommes-chats de Josu Arteaga.
Olariz, un tout petit village perdu dans les montagnes de Navarre. Comme dit le narrateur, qui vide son cœur « A Olariz, on sait quand quelqu’un va mourir ». Au fil des chapitres le narrateur égrène les anecdotes, raconte les saisons et les habitants d’un village qui se voudrait hors du temps mais qui est quand même rattrapé par le monde qui l’entoure. Des histoires grinçantes, dures, parfois drôles, parfois macabres. Car on meurt pas mal à Olariz, et personne ne pose trop de questions. On sait, mais jamais, au grand jamais, on ne parlera aux étrangers. Que ce soit le curé, la guardia civil ou les journalistes.
Et si autour d’Olariz le monde change, la politique change, toute l’Espagne change, ici on ne voit pas pourquoi on ne devrait pas continuer à traiter les affaires du village comme l’ont fait les grands-pères, et les grands-pères des grands-pères.
Attention roman rugueux. Ceux qui croient qu’il n’y a que les américains capables de décrire le monde rural éloigné de tout et resté bloqué dans une tradition centenaire, ou que le roman de rednecks n’existe que de l’autre côté de l’Atlantique peuvent se préparer à une belle claque.
Car question de dureté, de rudesse de la vie et des habitants, de refus de se laisser envahir par un « étranger » qui commence juste aux frontières du village, vous allez être servis. Le lecteur commence, un peu extérieur à lire des chapitres qui sont comme des nouvelles indépendantes les unes des autres. Petit à petit, sans s’en rendre compte, il se retrouve hypnotisé par ce monde, cette écriture, fasciné par sa cohérence, et happé par un mystère qui apparait, comme un paysage fantomatique dans la brume.
Certes, je ne le conseille ni aux amateurs d’intrigues survoltées, ni aux âmes trop sensibles, mais pour les autres c’est une superbe découverte d’une grande originalité.
Josu Arteaga / Histoire universelle des hommes-chats, (Historia universal de los hombres gatos, 2010), Nouveau monde (2022) traduit de l’espagnol par Pierre-Jean Bourgeat.