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Péché mortel

Carlo Lucarelli remonte le temps avec son personnage de flic, le commissaire De Luca que l’on retrouve à la fin de la guerre dans Péché mortel.

Eté 1943, étrange période à Bologne. La guerre sévit, les bombardements alliés font des victimes, les fascistes sont chassés du pouvoir, puis les allemands s’installent. Comment s’y retrouver ? le commissaire De Luca s’en fiche. Lui il est policier et il cherche la vérité. Lors de l’arrestation d’un trafiquant du marché noir il tombe sur un corps sans tête. Et plus tard, quand il la trouve, la tête, mais ce n’est pas la bonne.

Alors que toute sa hiérarchie lui dit de laisser tomber, qu’il y a des morts tous les jours à cause de la guerre, lui s’obstine. Il est flic, il a deux meurtres, il faut trouver les coupables. Quoi que cela lui coûte.

Carlo Lucarelli n’est pas le premier à mettre en scène un flic obstiné qui veut rendre justice à la victime d’un meurtre alors qu’autour les morts s’accumulent dans l’indifférence générale. Patrick Pécherot dans Tranchecaille, ou Ernesto Mallo dans L’aiguille dans une botte de foin l’ont fait avant lui, pour ne parler que d’eux.

Mais ce n’est pas parce que ce n’est pas nouveau que ce n’est pas bien. A son tour l’auteur italien met parfaitement en scène l’obstination d’un homme qui, dans l’absurdité et l’arbitraire du chaos se raccroche à son boulot, en faisant abstraction de tout le reste.

C’est ici toute la force et toute l’ambiguïté de son personnage, qui n’est pas fasciste, qui, on le sent, n’approuve pas le fascisme … mais qui ne s’y oppose pas non plus, même quand il se sent très mal à l’aise. Il fait son boulot, parce qu’il ne peut pas faire autrement. Il se fiche que les victimes ne comptent pas aux yeux de ses collègues, il se fiche d’atteindre des personnes dangereuses car très haut placées. Il fait son boulot.

Excellente enquête, personnage intéressant, et bien entendu, tout autour cette période que je connaissais fort mal de la fin de la guerre dans le nord de l’Italie.

Un roman passionnant.

Carlo Lucarelli / Péché mortel, (Peccato mortale, 2018), Métailié (2023) traduit de l’italien par Serge Quadruppani.

Rue Mexico

Chastity Riley de Simone Buchholz est de retour dans Rue Mexico.

Nouri Saroukhan, du clan Saroukhan de Brême est retrouvé mort dans sa voiture incendiée. Il s’avère rapidement que c’est un assassinat. Il semblerait qu’une jeune femme ait été témoin de l’affaire, mais elle a disparu. Chastity Riley et son collègue flic Ivo Stepanovic sont en charge de l’affaire et vont devoir aller à Brême interroger la famille. Problème, dans le clan Saroukhan, comme dans toute la communauté dont ils font partie, on considère les lois allemandes comme nulles et non avenues. Pour ne pas arranger les choses, pour une raison inconnue, ils considère que Nouri ne fait plus partie de la famille.

Un plaisir de retrouver Chastity, ses déambulations dans Hambourg, ses nuits de cuite, ses relations compliquées, sa bande. Tout ce que vous avez aimé dans les précédents volumes est là dans Rue Mexico.

En prime cette fois la description au vitriol de deux communautés. La première les Mahallami, originaires de l’empire turc, passés par le Liban, rejetés de partout, venus s’installer en Allemagne. Une communauté qui n’obéit qu’à ses propres lois, où le clan prime tout, et où l’individu, surtout s’il est de sexe féminin, ne compte pas.

La deuxième, les groupes de mâles blancs travaillant dans des secteurs de la finance et des assurances où on brasse beaucoup d’argent et où la réussite se matérialise par la voiture. Une communauté qui tourne autour de quelques valeurs : le fric, la bagnole et la coke qu’on s’enfile dans le pif.

Les deux communautés prennent cher. Le tout entre deux balades poétiques et alcoolisées dans Hambourg. Que voulez-vous de plus ?

Simone Buchholz / Rue Mexico, (Mexikoring, 2018), L’Atalante/Fusion (2023) traduit de l’allemand par Claudine Layre.

Petits désordres

Deux toulousains, Maïté Bernard et Christophe Guillaumot se sont mis ensemble pour nous amuser avec de Petits désordres qui font du bien.

La vie de Grégoire Leroy n’est pas simple. Commandant de police à Paris, à la tête d’une brigade de répression du proxénétisme, il doit s’occuper d’un mouton, d’un yorkshire guerrier, de deux carpes et d’une fille de 20 ans très engagée qui lui reproche en permanence de se comporter comme un vieux con.

Ajoutez un chef qui veut des résultats, des prostituées qui manifestent devant ses fenêtres, et un test à passer impérativement pour prouver, justement, qu’il n’est pas un vieux con et est conscient des changements de la société en termes d’inclusion de tous ceux qu’il faudrait inclure.

Il finit d’aggraver et de compliquer son cas quand il lâche, à bout de nerfs : « On n’est pas des pédés ». Mauvaise pioche …

Ce n’est pas un chef-d’œuvre, mais qu’est-ce que j’ai ri ! C’est déjà rare de sourire en lisant, et j’ai souri souvent, cela l’est beaucoup plus de rire, et j’ai éclaté de rire à deux ou trois reprises. Le style est vif, c’est drôle et enlevé, on le lit sourire aux lèvres en deux temps trois mouvements.

Maïté Bernard et Christophe Guillaumot ne reculent pas devant un poil d’exagération et de caricature, mais ce n’est jamais méchant et c’est pour la bonne cause, mettre en lumière les travers de notre société, les changements nécessaires et les travers associés.

Ajoutez un regard assez acéré sur une administration qui se couvre en jetant de la poudre aux yeux, ici la police. Ceci dit, ça ressemble tant à ce que je vis dans ma propre boite que le rire se fait parfois un peu jaune.

C’est gentil mais sans concession, c’est drôle et intelligent et on passe un excellent moment. Ce serait dommage de la rater.

Maïté Bernard et Christophe Guillaumot / Petits désordres, Liana Levi (2023).

Menaces italiennes

Avec Menaces italiennes, Jacques Moulins continue sa série consacrée à l’équipe d’Europol en charge de lutter contre le terrorisme d’extrême droite en Europe.

L’équipe de Deniz Salvère a démantelé un réseau de truands qui pratiquaient le rançonnage informatique au profit, entre autres, des mouvements d’extrême droite dans toute l’Europe. Fort de ce succès il obtient d’installer une partie de son groupe à Gênes, pour surveiller Ettore Guidi, industriel nostalgique de Mussolini qui s’agite et agite les clubs de supporters de foot.

Dans le même temps un ex tortionnaire de Sadam Hussein que l’équipe berlinoise surveillait est assassiné dans un parc de la ville. L’enquête sur un réseau européen et d’éventuelles tentatives de déstabilisation des démocraties européenne patine, et l’existence même de l’équipe de Salvère est remise en cause au plus haut niveau d’Europol …

Je vais commencer par un avertissement, et en même temps par quelque chose qui m’a un peu gêné. Impossible de lire (à mon avis) ce volume si vous n’avez pas lu les deux précédents, ou au moins le précédent. Il y est fait constamment référence, surtout dans la première moitié, au point que j’ai eu un peu de mal ne me souvenant pas des noms de tous les protagonistes, morts ou vivants.

C’est dommage, je trouve que ça rend la lecture de la première moitié parfois laborieuse. C’est d’autant plus dommage que l’ensemble est passionnant et tristement d’actualité. Heureusement, après une mise en place pendant laquelle j’ai un peu ramé, l’intrigue se noue, on se refamiliarise avec certains faits et personnages et on se prend au récit pour ne plus pouvoir le lâcher dans la deuxième moitié.

L’analyse et la description, jamais lourdes, des mécanismes utilisés par les forces d’extrême droite dans toute l’Europe, et ici plus précisément en Italie sont impeccables. L’auteur évite l’écueil qui aurait consisté à se concentrer sur cette analyse en oubliant de construire de vrais personnages et une vraie intrigue.

A lire donc. Il faudrait juste que l’auteur veille, par la suite, à faire des romans qui nécessitent moins de souvenirs des aventures précédentes, soit en faisant de subtils rappels, soit en les décorrélant. Mais ce n’est qu’un avis personnel.

Jacques Moulins / Menaces italiennes, Série Noire (2023).

Le sang de nos ennemis

Cela faisait un moment que l’on n’avait pas trop de ses nouvelles, Gérard Lecas revient avec Le sang de nos ennemis.

Marseille, cet été 1962 est un sacré chaudron. Entre les pieds noirs qui débarquent en masse, le SAC, l’OAS, les trafiquants de came de la French Connection, les anciens collabos et les anciens résistants ou leurs enfants …

Le cadavre d’un algérien est retrouvé vidé de son sang, pas loin de la ville. Anthureau jeune flic, communiste, fils de résistants fait équipe avec Molinari, ancien résistant, gaulliste, membre du SAC. Une façon pour les flics locaux de se débarrasser de deux indésirables en les neutralisant. Anthureau et Molinari que tout oppose et qui pourtant vont se découvrir beaucoup plus de points communs qu’ils ne le souhaiteraient, alors qu’un deuxième cadavre apparaît et que la guerre des gangs fait des ravages.

Bienvenue à Marseille.

Je ne vais pas affirmer que c’est le roman marquant du début d’année, mais c’est du bon boulot, solide. L’ambiance, ou plutôt les ambiances sont bien rendues, que ce soit côté malfrats, anciens résistants, ou parti communiste. Les personnages sont bien campés. L’intrigue est bien menée.

Et c’est surtout le contexte historique d’une époque charnière qui est passionnant. On a beau être lecteur de polars, ne plus avoir beaucoup d’illusions sur la nature humaine et savoir qu’une guerre propre n’existe pas, une partie des saloperies décrites ici n’a pas manqué de me surprendre et de me révolter. Ce qui est positif, c’est quand on ne pourra plus être ni surpris ni révoltés qu’il faudra s’inquiéter.

Un bon polar historique.

Gérard Lecas / Le sang de nos ennemis, Rivages/Noir (2023).

Le tueur au caillou

Dès son premier roman traduit, Alessandro Robecchi s’est affirmé comme une auteur italien à suivre, et à d’ailleurs gagné le prix Violeta Negra décerné lors de Toulouse polars du Sud. Avec ce troisième roman Le tueur au caillou, il confirme qu’il est un grand du polar italien qui compte quelques maestros.

Un boucher « de luxe », propriétaire de plusieurs boucheries très connues à Milan est abattu dans la rue, un soir. Le tueur a laissé un caillou sur le cadavre. L’homme était inconnu des services de police, aimé de tous, il payait ses impôts … Un grand mystère. C’est ensuite un promoteur en vue qui est abattu, avec une autre arme, mais toujours avec un caillou. Lui par contre avait quelques casseroles, mais surtout des appuis politiques puissants.

La grande bourgeoisie milanaise à peur, les journaux en font des tonnes, et Flora de Pisis, la grande prêtresse de l’émission bien putassière de notre ami producteur Carlo Monterossi ne reculera devant aucune vulgarité pour faire de l’audience et faire pleurer dans les chaumières.

De leur côté, les flics milanais, à la tête desquels se trouvent le brigadier Carella et le sous-brigadier Ghezzi que les habitués de l’auteur milanais connaissent déjà sont dessaisis de l’enquête au profit d’un grand cirque romain et d’un profileur israélien. Dessaisis ne veut pas dire inactifs, et Carlo, comme toujours, va se retrouver mêlé à l’affaire.

Alessandro Robecchi s’améliore de roman en roman, et pourtant le premier était déjà très bon. Là on passe au niveau supérieur. Il reste l’écriture vive et l’humour qui vient teinter le désespoir de plus en plus grand de Carlo et des flics. La critique de la société, jamais pesante, se fait impitoyable. Les médias, le grand cirque des réseaux sociaux sont cloués au pilori sans jamais tomber dans la leçon pesante.

Le sort des plus humbles est au centre du roman, sans pathos, sans angélisme, avec une tendresse et une humanité qui vous prend aux tripes. La morgue de ceux à qui la vie a tout donné est décrite d’une manière éclatante, d’autant plus que c’est ici au travers d’un personnage inoubliable.

Décidément un très grand auteur, un des maîtres du polar italien pourtant très riche. Et bonne nouvelle pour ceux qui n’ont pas lu les deux premiers, ils se lisent, pour l’instant, tous indépendamment, même s’il est parfois fait allusion aux romans précédents.

A lire absolument.

Alessandro Robecchi / Le tueur au caillou, (Torto marcio, 2017), l’aube noire (2023) traduit de l’italien par Paolo Bellomo et Agathe Lauriot dit Prévost.

Le soleil rouge de l’Assam

Le soleil rouge de l’Assam n’est « que » le quatrième roman d’Abir Mukherjee, et pourtant on a déjà l’impression de connaître le capitaine Wyndham et son assistant, le sergent Banerjee depuis toujours.

Sam Wyndham croyait faire une pause. Pas agréable la pause, mais une pause quand même. Il est en route vers un centre au cœur de l’Assam pour se désintoxiquer de l’opium. Au menu diète, boissons infâmes, vomissements et délires en tous genres. Mais cela ne suffit pas, en arrivant il croise une silhouette qui le ramène plus de 15 ans en arrière, en 1905 lors de ses débuts dans les quartiers pauvres de Londres. Il pense avoir croisé l’homme qui avait alors voulu le tuer.

Quand un de ses compagnons d’infortune est retrouvé mort près du centre, Wyndham ne peut s’empêcher d’enquêter, ni de se souvenir de cette première affaire, en 1905, qui lui avait laissé un goût particulièrement amer. Il lui faudra l’aide de Banerjee, venu le retrouver à la fin de sa cure pour tirer tout cela au clair.

Abir Mukherjee fait dans la continuité tout en se renouvelant. La continuité ce sont les deux personnages et le contexte de l’Inde des années 20 avec la montée du mouvement d’indépendance de Gandhi. C’est aussi la qualité de ses intrigues et de la construction de ses personnages.

Le renouvellement vient de plusieurs facteurs. Il change de lieu, nous faisant visiter une nouvelle région, et surtout il alterne entre le présent indien, et un début de 20° siècle à Londres où l’on voit que la morgue des colons n’est que la conséquence de celle des possédants anglais envers le peuple des quartiers pauvres, dont les habitants, réflexe malheureusement universel, trouvent dans les nouveaux immigrants (ici les juifs fuyant les pogroms) un bouc émissaire facile, encore plus mal loti qu’eux.

Le renouvellement vient aussi de l’absence de Banerjee pendant les ¾ du roman, et de son évolution, habilement mise en scène avec un humour bienvenu.

Il vient également ici de son hommage amusé aux grands anciens du polar so british, avec deux meurtres en chambre close, et un meurtre dans une maison où tout le monde a intérêt à trucider le mort.

Bref, l’auteur s’amuse, mais il s’amuse très sérieusement. Un vrai régal pour le lecteur.

Abir Mukherjee / Le soleil rouge de l’Assam, (Death in the east, 2019), Liana Levi (2023) traduit de l’anglais par Fanchita Gonzalez Battle.

Rétiaire(s)

Cela faisait un moment, le plaisir n’en est que plus grand. Voici le dernier DOA : Rétiaire(s).

Nous sommes en France (essentiellement), pendant le second confinement, celui de 2021. Théo Lasbleiz, flic des stups en congé abat devant témoins Nourredine Hadjaj, trafiquant connu des services de police. Amélie Vasseur, gendarme, s’occupe du trafic de drogue dans la région parisienne. Dans son collimateur, entre autres, un clan manouche, les Cerda.

Momo Cerda est en taule, c’est lui le cerveau. Dehors son demi-frère Manu est plus doué pour la violence que pour la réflexion, et Lola, la nièce, fait des études de droit souhaite rentrer dans les affaires familiales.

Ajoutez des rivalités entre renseignements, flics et gendarmes, une juge, des gangs concurrents et une énorme cargaison en provenance de Bolivie via l’Argentine. Secouez, servez chaud.

Facile de parler de ce bouquin. Si vous êtes fan de DOA vous allez adorer, si vous n’aimez pas, n’essayez même pas. Parce que c’est du DOA pur jus.

Dense, documenté, rythmé, sec comme un coup de trique. Il vous faudra faire un petit effort, l’auteur part du principe qu’il s’adresse à des lecteurs capables de concentration et d’attention. Et cet effort sera récompensé mille fois tant vous prendrez plaisir à suivre les différents personnages, à comprendre petit à petit les rouages des luttes, des trafics, des alliances et des rivalités.

Pas de chevalier blanc, ni chez les truands, ni chez les flics, tout le monde en prend pour son grade. Des scènes d’action réglées au millimètre, un beau travail sur la langue, un humour pince sans rire, des dialogues au cordeau, jonglant avec les niveaux de langage, et une maîtrise parfaite de l’intrigue.

Que vous dire de plus ? A garder pour une période où vous n’êtes pas fatigués. Avec une très bonne nouvelle, a priori il devrait y avoir une suite.

DOA / Rétiaire(s), Série Noire (2023).

Un simple enquêteur

Je n’avais encore jamais lu de roman mettant en scèneAvraham, le flic de Dror Mishani. C’est chose faite avec Un simple enquêteur. C’est le premier pour moi, mais certainement pas le dernier.

Avraham, qui vient de se marier et qui a un nouveau supérieur depuis le décès de sa chef et mentor a des doutes sur son métier. Il a l’impression de ne rien régler et de ne faire qu’ajouter du malheur au malheur, en clair, de ne servir à rien. C’est pourquoi il demande sa mutation à un poste plus important pour le pays.

En attendant il va s’intéresser à la disparition d’un touriste français d’un hôtel de seconde zone. Dans le même temps sa collaboratrice cherche à savoir qui a abandonné un bébé prématuré à la porte d’un hôpital. Deux enquêtes qui, étrangement, vont se croiser.

J’avais raté mon premier rendez-vous avec Dror Mishani. Je n’avais pas du tout accroché à son roman précédent Un deux trois, mais là je suis conquis. Tout ce que j’aime chez mes enquêteurs préférés. Un personnage humain, qui doute, qui parfois a peur, qui n’a pas un courage surhumain mais qui a des valeurs, qui s’accroche. Une histoire bien construite, avec beaucoup d’humanité. Des personnages secondaires inoubliables comme cette mère bigote et possessive (je vous laisse découvrir).

Et au travers d’une histoire et de personnages qui vous emportent, le portrait tout en petites touches et en finesse de la société israélienne actuelle. Un très grand plaisir de lecture. J’espère retrouver très vite Avraham qui est devenu, en un seul roman, un des personnages dont j’attends impatiemment des nouvelles.

Dror Mishani / Un simple enquêteur, (Emuna, 2021), Série Noire (2023) traduit de l’hébreu par Laurence Sendrowicz.

Une étude en noir

On entre en léthargie avant les sorties de janvier. L’occasion de ressortir un recueil du maître John Harvey qui trainait depuis des lustres sur ma table de nuit : Une étude en noir.

On va découvrir Jack Kiley, ancien footballeur professionnel éphémère, ancien flic dans la police londonienne, devenu privé qui vivote avec une petite affaire de temps en temps. On va retrouver Franck Elder au moment où il quitte Londres, encore avec sa femme et sa fille. Et on va retrouver Charles Resnick à Nottingham, à différents moments de sa vie, souvent avec Lynn, toujours avec ses chats.

On va suivre quelques musiciens de jazz anglais pris dans la tourmente de l’héroïne. On va croiser des destins brisés, des amitiés dévastées par l’appât du gain, des gamines massacrées, un ancien d’Irak au bord du gouffre.

Et puis il y a la musique, un peu toutes les musiques, mais surtout le jazz, avec la voix bouleversante de Billie, les accords piquants de Monk, la virtuosité de Art, Bird et Dizzie.

Tout ce qu’on aime dans les romans de John Harvey se retrouve ici, concentré dans ces nouvelles. Son regard lucide sur la société anglaise, son empathie, son humanité dont ses personnages sont les porte-parole, son amour de la musique et des clubs de foot qui ne gagnent jamais, ou presque. Et l’apparente simplicité d’une écriture qui ressemble tant à la voix d’un ami en train de vous raconter une histoire.

A ne pas rater pour les fans du maître du procédural britanique.

John Harvey / Une étude en noir, (2010), Rivages/Noir (2018) traduit de l’anglais par Karine Lalechère et Jean-Paul Gratias.