Attention ça pique !

Après le magnifique et éprouvant Les derniers jours d’un homme, Pascal Dessaint avait sans doute besoin d’espace, d’air pur et d’un peu de détente. Il a trouvé tout cela avec Le bal des frelons. Mais attention, l’air pur peut se révéler vicié, et la détente être un poil grinçante …

Un village paisible au pied de la montagne ariégeoise. Il y a là Michel, le maire, pas toujours très net ; Maxime l’apiculteur ; Antonin le retraité (ancien maton) ; Rémi, un peu « bizarre » qui parle à ses deux poules et à son amie, morte depuis quelques temps ; Coralie, la secrétaire du maire, vieille fille qui voudrait mais n’ose pas ; Martine l’épouse d’Antonin. Il y a aussi des frelons asiatiques, un ours, un hérisson, les abeilles, les poules de Rémi … Un village paisible donc. En apparence. Car comme ailleurs pouvoir, argent et sexe mènent la danse. Un danse mortelle

Retour dans le sud-ouest donc pour Pascal Dessaint. Mais pas encore à Toulouse. Comme pour son Poulpe, il plante sa plume dans les montagnes ariégeoises. Avec délectation, humour et une bonne dose de méchanceté (pas toujours) tendre. Une vraie hécatombe que ce bal des frelons, et les frelons en question ne sont pas forcément ceux que l’on croit. Un roman choral comme il les aime, parfaitement maîtrisé, grinçant et réjouissant.

L’occasion aussi de râler, une fois encore, contre les quatrièmes de couverture. Il y est dit que cette « farce drôle et cruelle » (ça c’est vrai), « rappelle Siniac » (pas mal trouvé) « ou le Charles Williams de Fantasia chez les ploucs ». Là, deux hypothèses. Soit je n’ai rien compris au roman, soit celui (ou celle) qui a pondu cette comparaison n’est pas allé plus loin que le titre du roman de Charles Williams. Ce n’est pas parce que Le bal des frelons se déroule effectivement « chez les ploucs » et qu’il s’y passe de drôles de choses que les deux romans ont un rapport ! Car ils n’en ont aucun.

Fantasia est très drôle, on y éclate de rire sans restriction, il tire son humour du regard décalé du narrateur (un enfant qui ne comprend pas forcément tout) et utilise toutes les ressources du quiproquo et du burlesque. Toujours drôle, jamais grinçant ou pessimiste, on est dans le registre de la grosse farce (grosse mais subtilement amenée) et ça marche. Si on voulait absolument trouver une analogie américaine à ce bal ariégeois, c’est plutôt du côté de l’humour très noir et de la vision pessimiste de la nature humaine de 1275 âmes qu’il faudrait aller chercher (même si la structure narrative n’a rien à voir).

Ceci dit, je râle, mais cela n’enlève rien au roman. Après tout, être comparé à Pierre Siniac et Jim Thompson, il y a pire, surtout quand on tient le choc de la comparaison.

Pascal Dessaint / Le bal des frelons, Rivages/Thriller (2011).

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