Château de cartes

Miguel Szymanski, comme son nom ne l’indique pas, est portugais. Son premier roman traduit chez nous, Château de cartes, est, je l’espère, le premier d’une longue série.

Une fois n’est pas coutume, voici la fin des remerciements de l’auteur :

« Je remercie également pour leur inspiration les banquiers, les magnats de la finance et les politiques que j’ai croisés tout au long de mes vingt-cinq ans de journalisme, mais aussi les directeurs de publication à leurs ordres. Je pense surtout à ceux qui m’ont menacé, m’ont licencié et ont tenté de m’intimider ou de me faire taire. Certains d’entre eux ont connu la faillite, d’autres ont été démasqués ou ont fini en prions, mais la majorité est toujours là, décidant du destin du pays et des gens qui l’habitent ».

Marcelo Silva a été journaliste à Lisbonne. Il a dû partir et est allé exercer en Allemagne. C’est là qu’un procureur ami vient le chercher pour prendre la tête d’une unité de police spécialisée dans les crimes en col blanc. Marcelo sait d’expérience qu’il n’aura pas les mains aussi libres qu’on le lui promet, mais il accepte.

Dès son arrivée une affaire défraie la chronique. Un des banquiers en vue de la ville a disparu. Dans le même temps, les bruits courent que sa banque est en faillite et qu’il était une sorte de Madoff lisboète. Et Marcelo commence dès le début à subir des pressions. Mais l’homme a de la ressource, il connaît tous les milieux de la ville comme sa poche, et il va essayer, tant bien que mal, de faire surgir la vérité. Le laissera-t-on faire ?

Les remerciements cités en début de cette note ne laissent guère de place au doute, l’auteur est en colère, et il ne manque pas d’humour. Grinçant l’humour. Et Marcelo Silva lui doit sans doute beaucoup, du moins c’est que l’on peut supposer.

Le ton est vif, l’humour noir, et on suit avec beaucoup de plaisir Marcelo qui marche beaucoup dans sa ville bien aimée Lisbonne. C’est aussi avec grand plaisir qu’on l’accompagne de bars en restaurants pour faire un sort à de fort nombreuses bouteilles, et qu’on salive à ses préparations culinaires. Tout cela, ainsi que ses rencontres avec ses amis, donne de la chair à une enquête centrée sur le monde de la banque et de la finance qui aurait pu être désincarnée.

Un roman très documenté, sans illusion et sans concession, rageur et drôle, des personnages auxquels on s’attache, une belle promenade dans Lisbonne, des quartiers populaires aux lieux fréquentés par le gratin financier mais aussi culturel. Que demander de plus ? La suite bien entendu.

Miguel Szymanski / Château de cartes, (Ouro prata e silva, 2019), Agullo (2022) traduit du portugais par Daniel Matias.

8 réflexions au sujet de « Château de cartes »

  1. Trane

    Suite au même article du Monde, je l’ai acheté et je suis entrain de le lire.
    C’est vraiment très bien pour qui aime ses sujets et si comme moi vous aimez Lisbonne vous serez comblés.
    Pas surpris que cela te plaise.

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  2. Joaquim Da Fonseca

    Des auteurs de polars Lisboètes, il y en a trop peu, a fortiori traduits en français. Merci pour le tuyau, j’étais passé à côté.
    Je viens de rentrer d’Algarve où, normalement, je ne vais jamais. C’est horrible de constater comment ils (« Os donos de Portugal ») ont vendu cette partie du pays, et ce depuis plus de 40 ans. Lisbonne n’est malheureusement pas épargnée.

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