Un nouvel auteur calabrais

Un nouvel auteur italien au seuil, Mimmo Gangemi que l’on découvre avec La revanche du petit juge. Délectable.

GangemiUne petite ville en bord de mer en Calabre. Giorgio Maremmi s’y ennuie à son poste de substitut du procureur, il n’attend qu’une occasion pour retourner dans le nord dont il est originaire. Un retour qui ne se fera jamais. Il ne prend pas au sérieux les menaces d’un gros bras minable de la ‘Ndrangheta, et se fait assassiner quelques jours plus tard.

Pour les autorités, les choses sont claires, il a été abattu par le frère du délinquant, un tueur en fuite depuis des semaines. Mais Alberto Lenzi, le « petit juge », plus connu pour ses conquêtes féminines et sa fainéantise proverbiale que pour son efficacité au travail, ne croit pas à cette version, lui qui connaît bien l’organisation. Avec l’aide de Mico Rota, boss respecté de la ‘Ndrangheta, en prison depuis presque 15 ans il va prendre tous les risques, même ceux de heurter des intérêts très puissants pour faire la lumière sur la mort de son collègue et ami.

Je ne vais pas prétendre qu’on a là la révélation de l’année. Mais qu’est-ce que je me suis fait plaisir !

Tout fonctionne fort bien dans ce polar, classique sur le fond : Comme de nombreux bons polars, les personnages sont bien campés, et surtout le cadre fait partie de l’intérêt du roman. Ici tout est en place :

Le lieux, très bien décrit, avec la beauté rude des collines, la présence envoutante de la mer, la culture des oliviers, la petite ville où tout le monde sait tout, mais où personne ne dit rien dès qu’on touche à la ‘Ndrangheta.

La ‘Ndrangheta justement, omniprésente, dans ses actions, dans la peur qu’elle inspire, comme une force incontournable qu’il faut prendre en compte, comme on prend en compte le vent ou la pluie. L’auteur fait ressentir le respect, la peur, certaines « valeurs », l’impunité, la corruption de tout un système féodal.

Les personnages sont bien plantés, du parrain local au petit juge qui décide, finalement, de sortir de la médiocrité dans laquelle il se complaisait.

Mais il y a aussi autre chose : un ton, une écriture, qui font sortir ce roman du « tout venant ». Malgré l’horreur de ce qui est conté, malgré la rage devant l’impunité, on sourit souvent. Parce l’écriture est vive, le langage imagé, les portraits de personnages secondaires croqués avec un vrai talent de caricaturiste. Les dialogues du cercle des notables de la ville sont, à ce titre, de vrais délices.

Du coup, un polar qui pourrait être aussi sombre et désespérant que, par exemple, Gomorra de Saviano se révèle un excellent polar, enlevé, assez jouissif par moment, de ceux qui vous font attendre avec impatience le prochain volume des aventures de son héros.

Mimmo Gangemi / La revanche du petit juge (Il giudice meschino, 2009), Seuil/Policiers (2015), traduit de l’italien par Christophe Meleschi.

8 réflexions au sujet de « Un nouvel auteur calabrais »

  1. Françoise

    Mais on belette, les bibliothécaires ne mettent pas la pression. Là où je bosse le prêt est de 4 semaines, éventuellement prolongeable de 2 semaines supplémentaires. Donc, si tu pars pas avec 10 James Lee Burke, les 3 Del Arbol et les 2 gros Padura, tu dois y arriver. Et d’ailleurs on ne loue pas, on prête et, en plus on est gentil(le)s, ah mais !
    😉

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  2. Meyer Meyer

    J’ai pris beaucoup de plaisir à la lecture mais il y a un je ne sais quoi (faiblesse de l’histoire ?) qui m’a empêcher d’adhérer entièrement. Je donnerai quand même une chance à ce petit juge en lisant le 2e opus

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  3. Françoise

    J’aime bien, mais je me demande s’il n’y a pas un problème avec la traduction (il est vrai que Quadru nous rend difficiles). Enfin, disons que je le lis avec plaisir, mais il ne m’embarque pas comme les quelques autres dont on a pris l’habitude de parler ici.

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